Faut-il avoir peur de la Russie ? (1/3)

Il y a quelques jours, un éminent député d’opposition polonaise de droite, Monsieur Marek Jurek, a publié sur le site de « Nouvelles de France » un texte mettant en garde contre le danger que représente, selon lui, la Russie de Poutine.

Malgré tout le respect que j’ai pour Monsieur Jurek, et, notamment, pour ses positions pro-vie que je partage entièrement, ce texte me semble être une parfaire illustration de la triple confusion largement répandue en Europe et particulièrement en Pologne :

– Confusion entre la nature de l’état russe contemporain et de l’Union Soviétique
– Analyse erronée du conflit ukrainien
– Fausse perception des dangers stratégiques pour l’Europe et pour la Pologne

Nous allons donc essayer de traiter ces trois points dans une série de trois articles successifs.

La première incompréhension concerne la nature de la Russie contemporaine. Elle est liée à la difficulté intellectuelle de saisir la différence entre un Etat idéologique et un Etat « normal », c’est-à-dire, la différence entre un Etat qui réalise des objectifs idéologiques, le plus souvent totalement irrationnels, et un état dont les objectifs sont déterminés par son intérêt national.

L’Union Soviétique était par excellence un Etat idéologique qui niait la réalité et poursuivait le but ultime de l’idéologie marxiste-léniniste : détruire le capitalisme dans le monde entier afin de le remplacer par la « dictature du prolétariat ». Dans la pratique, la « dictature du prolétariat » signifiait la dictature d’un petit groupe d’hommes (à l’époque on ignorait encore le principe de parité) censés représenter le prolétariat, ce dernier s’étant révélé incapable de comprendre et d’assumer ses propres intérêts.

Dans ce sens, contrairement à ce qu’on affirme le plus souvent, la politique de l’Union Soviétique, n’était pas le prolongement de la politique impériale des tsars, visant à consolider et à agrandir la Grande Russie par des conquêtes territoriales. La politique soviétique, menée par l’oligarchie communiste, elle-même prisonnière de l’idéologie (car l’idéologie était la seule et l’unique source sa légitimité), était à l’opposé de l’intérêt de leur propre pays.

Etait-il dans l’intérêt de la Russie de décimer sa propre population, de liquider ses élites intellectuelles et de réduire le pays à l’état de barbarie ? Etait-il dans l’intérêt de la Russie de lui imposer un modèle économique totalement inefficace qui a finalement mené le pays à l’implosion ?

L’Union Soviétique, occupant depuis 1945 une grande partie de l’Europe et dotée d’un puissant arsenal nucléaire, était extrêmement dangereuse car elle n’agissait pas selon la même rationalité que le monde occidental. Discuter avec les Soviétiques, c’était comme discuter avec un malade mental qui tient dans sa main une grenade dégoupillée.

La chute du communisme couronnée par la dissolution par Boris Eltsine du PCUS en 1991 a mis définitivement fin à la guerre froide et à la folie idéologique qui a ravagé la Russie et les pays occupés par l’URSS, emportant dans sa folie meurtrière plusieurs dizaines de millions de vies humaines.

Après vingt années d’exil, Alexandre Soljenitsyne, le grand écrivain russe et symbole de la résistance au communisme, rentre dans son pays en 1994. En 2007, il reçoit des mains de Vladimir Poutine le prix d’Etat russe.

Alors, Vladimir Poutine est-il ce nostalgique du communisme qui serait en train de reconstruire une nouvelle Union Soviétique, ce dictateur sans scrupules que nous dépeignent les média du mainstream ?

« Certes, Poutine est autoritaire et conservateur mais, à la différence de ses prédécesseurs, élu et réélu depuis l’an 2000, il est le premier dirigeant démocrate de l’histoire russe » souligne Frédéric Pons dans une interview à « Causeur ».

« Cette démocratie autoritaire n’est évidemment pas parfaite. Comment pourrait-elle l’être ? La démocratie n’existe en Russie que depuis le début des années 2000, après six siècles d’autocratie tsariste, trois quarts de siècle de dictature communiste, dix ans d’anarchie mortifère. L’Occident pratique la démocratie depuis deux cents ans ! Pays de 145 millions d’habitants (une centaine d’ethnies différentes) sur 11 millions de kilomètres carrés, la Russie ne se gouverne pas comme la douce France ou le paisible Royaume-Uni »

La légitimité du Président Poutine est renforcée par l’immense popularité dont il jouit dans son pays. Cet été, il a atteint 87 % d’opinions positives.

La classe moyenne, que les communistes ont détruit, est en train de croître rapidement en Russie : au début des années 2000 elle représentait moins d’un tiers de la population russe, aujourd’hui c’est 42%, c’est-à-dire environ 60 millions de personnes.

Il est vrai, comme le pointe M. Jurek, que Vladimir Poutine est issu du KGB, le seul véritable corps d’élite dans l’ancienne URSS. Il n’en est pas moins vrai que de nombreux magistrats et hauts fonctionnaires dans la Pologne d’aujourd’hui sont aussi d’anciens cadres du parti communiste, à commencer par M. Marek Belka, le Président de la Banque Nationale de Pologne. Le général Jaruzelski, le dernier dictateur communiste en Pologne, n’a-t-il pas été récemment enterré avec tous les honneurs dus à un chef d’état ?

A Moscou, comme le rappelle M. Jurek, le Mausolée de Lénine continue à abriter la dépouille de l’un des plus grands criminels de l’histoire. Mais ce mausolée est devenu aujourd’hui plus une curiosité touristique qu’un lieu de pèlerinage des adeptes du marxisme-léninisme. D’ailleurs, n’a-t-on pas décidé de préserver à Varsovie, en tant que souvenir du passé, le fameux « Palais de la Culture », bâtiment autant imposant qu’hideux, construit dans le plus pur style soc-réaliste, censé symboliser le triomphe du communisme et la domination de l’URSS.

En conclusion, on peut avancer trois affirmations :

– La Russie d’aujourd’hui est un pays de nature radicalement différente de l’Union Soviétique.
– Vladimir Poutine n’est pas en train de rétablir le communisme dans son pays.
– La démocratie en Russie, aussi imparfaite soit-elle, est une réalité.

A suivre…

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39 Comments

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  • Goupille , 15 octobre 2014 @ 18 h 07 min

    Pourquoi aurions-nous peur de la Russie ?
    Pourquoi devrions-nous obéir à un ordre venu de puissances qui veulent rétablir la guerre froide avec la Russie ?
    Voire une guerre chaude sur notre territoire, comme toujours ?

    Il importe d’être libres. Et sûrs de nous.
    “Le calme des vieilles troupes”…

  • Tolosan , 15 octobre 2014 @ 18 h 31 min

    Je pense que les polonais surestiment énormément le danger russe et je suis d’accord avec l’analyse développée dans cet article. Pour autant, je peux comprendre leurs craintes pour toutes les guerres successives qu’ils menèrent contre les russes! Pour comprendre toutes les tensions actuelles en Europe de l’Est, il faut savoir que tous ces peuples n’ont rien oublié des nombreux massacres passés. Les polonais ont toujours en tête le massacre de Katine et le fait qu’en 1939, les russes ont attaqué en même temps que les allemands! Le russe reste l’ennemi héréditaire. Mais les polonais ne sont pas non plus des oies blanches, et quand ils ont été les plus forts, ils ont aussi “tapé” sur les russes!!! Cependant, cela remonte bien plus loin dans le passé. Les ukrainiens de l’Ouest du pays n’ont rien oublié des massacres commis par les russes sous Staline… et les russes les massacres perpétrés par les ukrainiens alliés des Nazis.. Tous ces gens vivent donc avec plein de souvenirs vieux d’un demi siècle en tête. Aussi, les tensions nationalistes restent donc très vives à l’Est et un certain nombre, très minoritaire certes, a envie d’en découdre.

  • taras , 15 octobre 2014 @ 20 h 43 min

    un bouffon russolatre, comme Parlier et Hermeniais…

  • V_Parlier , 15 octobre 2014 @ 23 h 21 min

    Oh, me voici donc célèbre, que c’est beau !

  • Ajax , 16 octobre 2014 @ 0 h 03 min

    L’Europe est-elle en démocratie ? Soit les gens votent, mais après ?

  • Alexandre , 16 octobre 2014 @ 2 h 01 min

    Peur de la Russie ? C’est une blague ?

    Le conflit ukrainien ne sert que les intérêts du commerce économique mondial, le mondialisme, sous tutelle maçonnique, la même salop***rie qui a infecté la mafia étasunienne comme la clique de la mafia russe qui est sur le même échiquier

    Le conflit ukrainien ne vise qu’à essayer de briser la future union des peuples slaves, fondée sur des valeurs diamétralement opposées à la culture à goût de chiotte mondialiste dans laquelle les pays occidentaux se sont enfoncés depuis des décennies, y compris la nouvelle classe bourgeoise russe.

    La Pologne n’aura jamais peur de ses ennemis, qu’ils soient russes sous tutelles de leur oligarchie mafieuse, américains sous tutelle judeo- atlantiste, européens sous tutelle socialo – mazo – suicidaire. Le conflit ukrainien, cela ne vise qu’à essayer d’enfoncer l’Ukraine, alors que l’union des pays slaves indépendants, voilà ce qui donnerait la diarée à Poutine comme à Obama, et ferait uriner dans leur pantalon les marionnettes bruxelloises .

    Peur ? peur de quoi ? Russie, USA, Union Européenne ? des colosses aux pieds d’argile, emplis de multiples failles, même les islamistes font ce qu’ils veulent, la masse immigration va finir par achever ces nations, qui n’ont plus aucun socle social et culturel,de base , donc plus rien, prêtes à se faire macrophager par toutes les forces ennemies qui rêvent depuis des décennies de les dissoudre. Même votre chef nationaliste, Marine Le Pen, pourtant unique espoir, devient elle même une marionnette en voulant s’aligner sur les courants mondialistes, prête à maquer son parti avec les francs maçons (d’ailleurs, le prochain nom de son parti politique devrait s’appeler le parti des bisounours bleus) . On l’a préférée à Gollnisch, on a préféré la princesse avec une cuillère en or dans le cul plutôt qu’un représentant suffisamment cultivé pour représenter la France.

    A la différence des cultures occidentales, les courants mondialistes n’auront pas raison des identités slaves. En France, dans à peine 20 ans, si vous ne prenez pas les mesures courageuses nécessaires, toutes vos filles, vos nièces, petits enfants, seront maqués avec des muzz, vous aurez été génocidés. La guerre qui se joue en France est amplement bien plus insidieuse. Chacun des faits divers (relayés par exemple dans fdesouche ) ne se produisent pas dans les pays slaves . Et pour vous en sortir, vous voulez vous accouplez avec une oligarchie russe islamophile, ( les oligarques occidentaux se prostituent avec les sunnites, les oligarques russes s’accouplent avec les chiites…)

    Sortir du fumier intellectuel dans lequel vous êtes noyés, ce n’est pas Poutine qui viendra vous aider, bien au contraire, il ne fait que profiter de la merde dans laquelle vous êtes plongés pour vous manipuler.

  • tocquelin , 16 octobre 2014 @ 8 h 05 min

    Poutine de l’ex KGB mais Bush père ex directeur de la cia personne ne le remarque
    qui a creé l’ URSS et l’ a gouverné:à 80 %(sinon plus) des non russes ex Staline georgien ,Trostky Kameniev Zinoviev Sverdlov Kakanovitch juifs Beria abkhaze Brejnev et Podgorny(voir Kroutchev) ukrainiens Mikoyan arménien lénine bien peu russe (voir Wikipédia) etc etc Le peuple russe a subi autant que les autres le joug communiste, idéologie européenne et non russe
    Depuis ANNE et Elisabeth Eltsine et Poutine sont quasiment les seuls vrais Russes à la tète de la Russie
    Toute comparaison avec la France actuelle serait malvenue

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