L’UMP, un cocktail d’impostures

Tribune libre de Christian Vanneste*

En fait, il faudrait lire ce texte avec l’accent de Gaudin puisqu’on va parler du cocktail de Pagnol, celui à quatre tiers. Alors, vous prenez un petit tiers d’opposition au mariage unisexe. C’est fou ce qu’ils sont mobilisés, à l’UMP contre la loi Taubira ! Tellement mobilisés que deux députés, dont un ancien ministre ont voté pour à titre très personnel ! Tellement, que deux anciens ministres, dont la future candidate investie à Paris se sont abstenus, sans risque. Un mauvais esprit comparerait cette attitude à la censure interne dont j’ai été victime de la part de Copé comme de Bertrand pour m’être opposé à la dérive de la reconnaissance sociale de l’homosexualité par l’UMP, à l’occasion de l’instauration de la Halde, par exemple… J’étais alors l’objet d’attaques virulentes du président des « Jeunes pop », et de bien d’autres, confondant manifestement orientation sexuelle et ligne politique. Ils n’étaient pas les seuls, puisque après une pluie de condamnations pour avoir rappelé une vérité historique incontestable, les tartufes qui dirigent ce parti m’ont retiré mon investiture. Qui était président de la commission qui a pris cette décision sans même m’avoir écouté, malgré ma demande ? Mais ce bon RaminaGaudin qui vient de laisser passer la loi Taubira au Sénat sans exiger un vote public qui permette de savoir qui était présent dans cette assemblée clairsemée, peu mobilisée pour une loi qu’on avait crue importante aux yeux de l’UMP. C’était, pourtant, le seul moyen de connaître ceux qui l’avaient votée, et ceux qui l’avaient repoussée. L’hypocrisie de l’UMP sur ce texte atteint des records. Certains ont rejoint l’UDI pour être plus à l’aise pour voter la loi, comme deux anciens ministres très sarkozystes, d’autres demeurent à l’UMP et approuvent la loi ou s’abstiennent, sans problème, d’autres, enfin, qui ne m’ont nullement soutenu et ont même témoigné leur sympathie à « Gaylib », le mouvement gay de l’UMP, prennent maintenant la tête d’une croisade purement, si j’ose dire, politicienne et électorale contre la loi. Parmi ces derniers, certains réclament un référendum. Mais, comme c’est curieux, ils n’ont pas voté une loi d’application de la réforme constitutionnelle de 2008 le permettant clairement…

On ajoutera un bon tiers de politique sécuritaire : le karcher, les halls d’immeubles, les peines plancher, la politique répressive de Sarkozy, comme dirait Taubira… A part que c’était du vent, que j’ai dénoncé comme il fallait lors du vote de la loi pénitentiaire de 2009, cette mesure de gestion hotelière destinée à vider les prisons pour éviter d’avoir trop à en construire. Les jérémiades ponctuées de larmes sur le sort tragique des détenus étaient au rendez-vous, avec une approche idéologique de gauche, notamment chez le rapporteur ump du Sénat. Résultat : Redoine Faïd, condamné à 20 ans, libéré au bout de 10, et à nouveau arrêté, ne peut plus être fouillé et s’évade. Entre 2001 et 2010, les policiers et gendarmes sont passés de 225000 à 217000, les policiers bénéficient des 35 heures depuis 2003 alors que la population a augmenté de 5%. La RGPP a , par ailleurs, raboté les effectifs entre 2010 et 2012. Sécuritaire, Sarkozy ? Dans le genre matamore, tout en mots, mais la réalité, c’est autre chose…

Reste un gros tiers pour le sérieux économique de l’UMP, posture si facile, devant l’ineptie de la gauche. Sauf que le creusement des déficits et de la dette pour relancer l’économie après l’élection de 2007 et face à la crise s’est révélé un redoutable contre-sens, sans effet positif sur l’emploi alors qu’aucune réforme structurelle d’ampleur n’était entreprise, ni sur le financement de la protection sociale, ni sur les retraites. En 10 ans, l’UMP a réussi à prouver que la droite n’etait pas meilleure que la gauche pour l’économie : avec 56% de dépenses publiques, la France est restée socialiste. Elle n’a pas supprimé les 35 heures, ni l’ISF, ni instauré la TVA sociale mais elle a voté le principe de précaution, dit non aux OGM et au gaz de schiste, et même failli voter une taxe carbone, histoire de nous enfoncer un peu plus…

Dans le cocktail de Pagnol, le quatrième tiers, c’est l’eau. Ici, c’est un très gros tiers d’eau tiède, qui est celle où baigne un parti dénué d’idées et de valeurs. Que penser des prétendus gaullistes qui souhaitent trouver dans l’abandon de la souveraineté nationale la solution aux problèmes d’une Europe de moins en moins démocratique ? On a compris, sauf à être très distrait, que l’UMP n’est plus qu’une machine électorale qui gère des carrières et des ambitions, pour les unes de moins en moins justifiées, et pour les autres de moins en moins légitimes. Comme dirait Marius, un cocktail, les clients n’en prennent qu’un à la fois. Ils ne peuvent pas comparer. Mais s’ils le pouvaient, le reprendraient-ils à chaque alternance ?

*Christian Vanneste est un ancien député UMP du Nord.

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22 Comments

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  • Sympathisant , 25 juin 2013 @ 15 h 19 min

    La seule réponse militante à un système que l’on désapprouve, c’est le vote blanc, ou, à défaut, l’abstention.
    Imaginez des élections avec un taux de participation de 40%. Quelle légitimité pour ceux qui sont élus avec 55% de 40% – 22% des électeurs ?

    La lutte pour le contrôle des partis composantes de l’UMPS est un pacte faustien : il faut d’abord y perdre son âme (et beaucoup de temps).

    Il est plus efficace de se concentrer sur les élections locales, ne voter que pour ceux qui représentent vraiment ce en quoi vous croyez; à défaut : ne pas voter.

    La discipline de vote des partis est un totalitarisme. Il faut lui substituer à nouveau la responsabilité individuelle; et exiger la transparence des gestes publics (législatifs et budgétaires).

    A chaque élection, si le choix se limite à Charybde et Scylla, on passe son chemin. Sans se retourner.

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