Pourquoi la Génération Y est insatisfaite et malheureuse ?

La Génération Y, ce sont les personnes nées entre les années 70 et le milieu des années 90 – le terme a été inventé en 1993 par le magasine Advertising Age, désignant ainsi la génération qui suit la Génération X (née approximativement entre 1965 et 1977).

La Génération Y, ce sont aussi les « Echos Boomers » en référence au fait que beaucoup sont des enfants de baby-boomers, ou des « Enfants du millénaire » (« Millenials » en anglais) en lien avec leur date de naissance. Les américains utilisent également l’expression « Digital Natives » pour pointer le fait que ces enfants sont nés avec un ordinateur ou tout simplement les diminutifs « GenY » ou « Yers ».

En France, la Génération Y regroupe environ 13 millions de personnes, soit près de 21% de la population française (13 192 178 ont vu le jour selon l’INSEE entre 1978 et 1994). Il s’agit de la génération la plus importante depuis la génération du baby-boom.

A titre de comparaison, la Génération Y comprend environ 70 millions de personnes aux États-Unis et 200 millions de personnes en Chine.

En quoi consiste l’insatisfaction ?

Avant tout, tentons d’exprimer une approche philosophique à travers les mathématiques :

Bonheur = Réalité – Attentes
ou
Malheur < zéro > Bonheur

Si les Attentes sont supérieures à la Réalité, alors le Bonheur devient négatif, c’est-à-dire se transforme en Malheur (insatisfaction).

Maintenant, prenons un individu Lambda de la génération Y possédant tous les attributs de la vie moderne et, grossièrement, n’ayant pas de problèmes majeurs dans leurs vies (nous parlons encore et toujours de monsieur et madame toutlemonde des pays développés).

L’individu Lambda est insatisfait de sa vie. Il est malheureux. Il est convaincu qu’il peut et doit avoir plus. Quoi exactement – il ne sait pas – mais il veut. Il veut vivre beaucoup mieux.

Alors, pourquoi est-il insatisfait et malheureux ? Il faut creuser l’histoire et la sociologie pour comprendre.

Les parents de Lambda sont nés dans les années 50 (après-guerre, baby-boom). Ils ont été éduqués par leurs parents ayant vécu deux guerres mondiales (ou au moins une) dans les conditions économiques et sociales que Lambda n’est aujourd’hui même pas capable d’imaginer et encore moins de s’y projeter.

Alors, les grands parents de Lambda (ayant survécu les temps vraiment durs et étant naturellement obnubilés par la recherche permanente de stabilité) ont éduqué ses parents dans la logique d’économies permanentes, de sacrifices et surtout dans l’idéologie du travail intrépide et quotidien, afin d’obtenir de l’herbe verte sous le soleil. Ils voulaient à tout prix que leurs enfants aient un travail stable et leur permettant d’accéder à un gazon avec une herbe plus juteuse, qu’ils en aient eu à leur époque.

Après leurs études et au début de la vie active, les parents de Lambda ont assisté à un boom économique lié au baby-boom et à l’ère d’après-guerre. Leurs perception du monde, malgré l’éducation, a rapidement changé. Et leur perception de possibilités s’ouvrant à eux a doublé de volume.

Cette optique a automatiquement eu une répercussion sur l’éducation de la Génération Y (Mr/Mme Lambda).

Spécial [spesjal]
adjectif (spéciale, spéciaux, spéciales)
1. non conforme à une règle ou à une habitude
2. qui est propre ou particulier (à quelque chose)
Synonyme: spécifique
Synonyme: particulier
3. indescriptible et qui sort de l’ordinaire (familier)

Des millions de parents heureux à travers les pays en pleine montée des années 70-90 inculquaient à leurs progénitures qu’ils font partie d’une génération spéciale, vivant à une époque spéciale, et qui vont rentrer dans l’histoire comme les gens uniques et chanceux pouvant obtenir de la vie tout ce qu’ils souhaitent.

Voilà pourquoi la Génération Y a été doté de lunettes roses à vie. Elle ne les porte pas sur son nez, elles sont intégrés directement dans son cerveau. La génération Y n’est pas digne des gazons à l’herbe juteuse – elle doit avoir des pelouses entière remplies d’herbe et de fleurs de toutes les tailles et couleurs.

En effet, il faut comprendre qu’un simple gazon est trop prédicable et n’est pas si extraordinaire…

La Génération X voulait vivre le rêve américain – la Génération Y veut vivre ses propres rêves.

De nos jours une carrière sécurisée n’est plus en vogue – il est de bon ton de suivre son rêve.

Les GenY’s veulent une carrière fleurissante, comme leurs parents, mais ils veulent aussi et surtout des bonus de la vie que leurs parents ne pouvaient même pas imaginer (sans parler de « rêver »).

Lambda pense que tout le monde peut réussir professionnellement, avoir un salaire correct et vivre correctement. Mais lui… Lui, il est particulier, il n’est pas tout le monde. Il est spécial. Il peut mieux, il vaut mieux, il va obligatoirement avoir… devenir… être…

Le résultat – la génération entière se considère particulière et spéciale. La difficulté est que « spécial » est celui ou ce qui sort du lot, or tout le monde ne peut pas sortir du lot. Tout le monde sortant du lot relève de la même utopie que la théorie marxiste sur l’égalitarisme. La chose au fond comprise par tout le monde, néanmoins la « génération spéciale » persiste à croire qu’elle est spéciale au carré. « Les autres peuvent penser ce qu’ils veulent, mais moi je suis vraiment spécial ».

Le labeur n’est pas pour les spéciaux

Si les parents de Lambda étaient raisonnablement persuadés que les gazons verts sont atteignables grâce au travail quotidien et ce pendant des années, Lambda pense que la pelouse remplies de fleurs doit tomber du ciel, car il est particulièrement spécial.

Lambda, confiné dans son micro-monde d’Alice au pays des merveilles, considère qu’on va remarquer ses incroyables talents dès qu’il aura traversé la porte de son premier bureau – et qu’il va se retrouver avec un bureau individuel, un chauffeur, des costumes sur mesure, deux assistantes en minijupes et un salaire lui permettant un week-end sur deux de louer un 50 mètres pour faire une mégateufe (langage typique des écho-boomers), où tout le monde voudra se prendre en photo avec lui, tellement sa réussite sera enviable, ainsi que sa jeunesse, sa beauté et sa richesse.

La réalité est quelque peu différente – c’est celle que tout le monde connaît. Pour avoir de l’herbe (qui paraît toujours plus verte et mieux tondues chez les autres), il faut des années de labeur quotidien, voire 7/7. Et souvent elle coûte pas mal de sueur, de larmes et de sacrifice.

La vie est injuste. Gravez-vous ça dans la tête !

Bill Gates

Le professeur à l’université de New Hampshire, spécialiste dans les questions sur la génération Y, Paul Harvey, explique que la raison principale d’insatisfaction et du sentiment d’être malheureux provient des attentes incommensurablement élevées de la Génération Y.

Globalement, cette génération ne souhaite pas porter un regard objectif sur elle-même et sur le monde, dont elle fait partie. Et même si certains le font, ils ne veulent pas ou n’arrivent pas à le reconnaître au fond d’eux-mêmes.

Mr Harvey suggère aux employeurs, confrontés aux GenY’s, de poser deux questions essentielles : « Pensez-vous être le meilleur ou être meilleur que votre entourage ? » et « Si oui, alors pourquoi ? ».

Généralement les Lambdas répondent rapidement et sans réfléchir « Oui ». Mais obtenir une réponse claire et argumentée à la deuxième question s’avère sensiblement plus compliqué, voire impossible. Le professeur de New Hampshire explique ce phénomène par le fait que toute cette certitude provient des éloges infondés et réellement non-mérités récoltés tout au long de leur vie.

Ainsi, quelques années après l’université ou l’école de commerce, les Lambdas, dans leur flagrante et indiscutable majorité, se retrouvent au même niveau qu’au départ. Et la belle pelouse rêvée (imaginaire ?) continue à se situer quelque part derrière un gros nuage des années de labeur intensif, des tentatives et des erreurs.
La réalité de Lambda se trouve au niveau négatif par rapport à ses attentes. Et la vie ne paraît plus aussi merveilleuse qu’il la rêvait.

Le constat corollaire – les GenY’s sont très acrimonieux.

Bien sûr, certains ont fait de bonnes études et ont trouvé du travail meilleur que leurs parents (Génération X). Mais Lambda en est au courant uniquement à travers les récits en pièces détachées. Personne en réalité ne sait pas grand-chose sur la carrière des autres…

Et c’est ici que rentre en scène la foire de vanité moderne – les réseaux sociaux et Internet plus généralement. Les phénomènes intéressants et utiles, mais à la fois parasites.

Tout le monde y exprime quasi-exclusivement ces succès et excessivement rarement, voire jamais, ses erreurs et échecs. Lambda y voit systématiquement les bling-photos, les grosses voitures, les gros seins (pour Mr Lambda) et les gros muscles (pour Mme Lambda), les magnifiques maisons, les photos fascinantes de voyages lointains et inimaginables, les meilleures soirées de la planète ou même de la semaine dernière que Lambda a loupé. Mais c’est parce qu’il l’a loupé qu’elle était meilleure que toutes celles qu’il a connues.

Les GenY’s voient tous les jours depuis des années sur internet et les réseaux sociaux « la société Z a réalisé les ventes-records historiques – tout le personnel s’est vu partir aux Maldives pendant 2 semaines », « un multimillionnaire s’est offert le cinquième yacht et sa neuvième femme », « 2 mois après le mariage – la neuvième femme a demandé le divorce et a obtenu $50 000 000, une villa de 4 000 m², un Falcon et beaucoup de peluches », « la fille qui chantait dans le métro maintenant chante sur RTL et demain ira chanter sur M6 pour le prime time et gagnera un disque d’or », « à 16 ans il a écrit un livre et devenu riche et connu en 3 semaines, maintenant ses livres traduits dans toutes les langues du monde se vendent par dizaines de millions »…

Nombreux sont ceux qui y croient, mais la Génération Y en particulier – c’est leur temps, c’est leur époque, ils sont spéciaux.

Le résultat ? Une idée trompeuse se forme dans l’esprit de Lambda, il a l’impression que tout le monde autour a atteint le succès, sauf lui. Il reste sur son gazon sans herbe à chercher où peut apparaître une nouvelle pousse.

Mais en réalité et en dehors des réseaux sociaux et d’autres médias, ces gens à succès peuvent banalement être les voisins du palier ou de la pelouse de Lambda.

Ainsi, peut être que Lambda a bien commencé sa carrière et se trouve sur la bonne voie, mais pour lui tout cela est profondément décevant.

L’herbe paraissant plus verte chez les autres n’est pas quelque chose de nouveau en soi. Mais dans le monde des photos retouchées, l’herbe des autres peut paraître paradisiaque. La vérité, c’est que tout le monde est indécis, frustré et doute de soi-même… comme vous !

> Cet article a initialement été publié sur NewPointDeView.com.

Lire aussi :
> Génération de m… ! par Éric Martin

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49 Comments

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  • 0 / 10
  • Franck , 3 janvier 2014 @ 15 h 15 min

    Etre le meilleur…
    Intéressant, mais qu’est ce que cela signifie…?
    Etre celui qui brille plus que les autres,
    Etre le plus apte à écraser son voisin,
    Etre celui qui licenciera le plus de personne afin de conserver un meilleur revenu pour soi et sa caste,
    Etre celui qui automatisera au plus la société en étant ainsi sûr que le travail sera bien fait et à moindre coût, mais en oubliant que sans travail point de consommation,
    Etc etc
    Ou,
    Etre celui qui arrive à subsister et/ou faire subsister les siens face à un monde devenu totalement dément où la seule valeur respectée par tous et celle de l’argent.
    Quoi de neuf dans tout ce que vous écrivez? c’est pas moi, c’est l’autre! jeunes contre vieux!
    Il est effectivement très difficile pour tous d’entendre une critique, même si elle s’avère constructive…puisque si l’on est critiquable, c’est qu’on est pas le meilleur!
    “Jeune homme, je vous attaque sur l’orthographe, ça m’évite d’avoir à me justifier sur vos arguments, somme toute, pertinents.”
    En tout cas, ce qui est sur, c’est que le mur dont vous parlez, on va le voir tous de très prêt, car on s’en rapproche à la vitesse V.
    Ne serait il pas plus judicieux d’apprendre à vivre ensemble et surtout de prospérer ensemble.
    Moi je dis ça, je suis né en 1972, et tous les jours je me bats, j’ai connu 2 fois le chômage, je gagne aujourd’hui moins que lorsque j’ai commencé à travailler à l’age de 21 ans, je paye plus d’impôts qu’à l’époque, on m’a appris qu’il faut être le meilleur, comme un crédule j’y ai cru, mais la réalité de la vie m’a appris beaucoup, notamment qu’il est plus facile de fermer les yeux et/ou de dire du mal de son imbécile de voisin…
    Sur ce, bonne année, même si évidemment tout le monde sait que personne ne le pense vraiment et que ce n’est que purement formel.

  • mike , 20 janvier 2014 @ 20 h 35 min

    Apparemment tu n’as pas trouvé le site du Bescherelle…

  • mike , 20 janvier 2014 @ 20 h 49 min

    J’ai toujours du mal à prendre au sérieux un auteur, pardon co-traducteur (c’est bien ça?), quelque soit sa génération, qui confond séniors et seigneurs…

  • Bapti , 19 février 2014 @ 10 h 13 min

    Remplacer Lambda par journaliste de Nouvelle de France et vous obtiendrais un article bien plus proche de la vérité… C’est juste hallucinant de clichés sur les nouvelles générations… Triste France que celle qui ne croit même pas en sa jeunesse

  • Bapti , 19 février 2014 @ 10 h 20 min

    Tellement révolté que j’en oublie mon français, il fallait lire “vous obtiendrez”

  • azoile , 9 mars 2014 @ 14 h 00 min

    On peut mettre sur le dos d’une certaine incapacité à prendre conscience du monde de la part de ces jeunes Lambdas, mais le réel problème, comme un retour de bâton, c’est plutôt le manque de vue de la Génération X. Elle s’est certes battue pour de beaux acquis, mais dans la cage dorée de l’après guerre. La notion d’être meilleur, est toujours corrélée à la notion de progrès permanent, progrès que la génération X n’a jamais pu rendre pérenne. Cette génération Y est l’enfant terrible du progrès. Placée dès la naissance sous le manque de vues de ces parents. Les grand parents d’Y, bien qu’ayant vécu les deux guerres, étaient les descendants d’un temps long, produit et rythmé par des éléments pérennes. La génération X a su sortir de cela pour redonner une flèche au temps, mais n’a jamais su, par tous les moyens qui lui étaient pourtant offerts, (éducation, embellie économique, sociale etc…) donner en retour cette flèche du temps à la génération Y. C’est ici que se trouve le malheur, le passage de relais ne s’est jamais effectué. Ils ne sont pas meilleurs, on leur a juste inculqué cela sans aucune vision à long terme. C’est pourquoi aujourd’hui tout se craquèle, tous les acquis que la génération X a gagné, dans lesquels elle s’est investit sans jamais penser plus loin que l’échelle de sa propre génération. Et aujourd’hui que cette génération X est moribonde, on nous parle de “renouvelable”, “décroissance”, mais avec les forces vieillissantes de ceux qui, encore quelques années auparavant, auraient pu y songer plus tôt, quand ils étaient encore dans la force de l’âge. Y songer plus tôt, afin que rien ne se perde, mais que tout se transforme.

  • Flo , 1 avril 2014 @ 2 h 19 min

    Je fais partie de cette génération et je ne supporte plus ces clichés évoquant des enfants assistés et frustrés. Non mais vous avez regardé le monde dans lequel on vie? Vous croyez franchement que nous sommes pas heureux seulement parce que l’on a été gâté dans l’enfance et qu’il faut maintenant se débrouiller seul ?

    Les médias auxquels nous sommes confrontés nous poussent à détester notre quotidien. Les infos sont un condensé du pire qu’il peut y avoir : guerres, chômage, scandales, aliments ou médicaments ou carburants cancérigènes, les ondes téléphoniques et Wifi sont dangereuses, réchauffement climatique etc. Les réseaux sociaux bouffent les relations humaines. Les gens deviennent narcissiques, ne se voient plus en face à face et s’envoient des invitations à jouer à des jeux A force d’être confronté à ça, comment voulez vous ne pas déprimer ?

    Oui, on nous a dit “fait des études, tu vivras bien et tu auras une belle voiture” et oui on tombe tous de haut. Ben oui on nous demande à 15 ans de nous orienter, de suivre une filière et de faire tous les efforts nécessaires. Sauf qu’à cet âge là qui sait vraiment ce qu’il veut et ce qui le mènera vers un job? Alors le lambda avance dans sa filière sans réelles informations sur son devenir et s’enferme dans un domaine qu’il va seulement découvrir. Si ça lui plait ou le mène vers un métier c’est bien, si non, c’est pas de chance car la réorientation n’est pas si simple et si il ose s’en plaindre, on lui dira “c’est toi qui a choisi.” Voilà. Et faut-il ajouter que l’on laisse des jeunes s’engager dans des filières qui mènent à rien (bac +5 au chômage vous connaissez ?) en leur disant “c’est bien continue la dedans”? Il est peut être temps de mettre les pieds dans le plat et de tout revoir !

    Alors oui excusez nous de ne pas être content et de le faire savoir. Regardez ce que l’on va devoir gérer à l’avenir au niveau social, économique et écologique et comprenez qu’on s’en inquiète. On a peut être tous le dernier Smartphone ou un véhicule mais si le matériel rendait heureux,ça se saurait!

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