Bientôt la révolution ?

Tribune libre de Philippe Simonnot*

Le nombre des sans-emplois en France  atteindra sans doute 3,5 millions fin 2013. À partir de ce nouveau pic, il n’est pas impensable que le nombre de chômeurs diminue. C’est ce que des économistes intéressés ont soufflé au président de la République sous le sapin de Noël. D’où le pari qu’a pris publiquement François Hollande dans ses vœux pathétiques du Nouvel An : « Toutes nos forces seront tendues vers un seul but ; inverser la courbe du chômage d’ici un an. Nous devrons y parvenir coûte que coûte. » 

Coûte que coûte, on a bien entendu. Traduisons : à coup d’emplois bidons subventionnés sur fonds publics qui transformeront de vrais chômeurs en faux travailleurs aux frais du contribuable. Cent mille « emplois d’avenir »  s’ajouteront  à cent mille « contrats de génération ». Soit deux cent mille créations d’emplois en 2013. Juste ce qu’il faut pour répondre  à l’arrivée de 120 000 personnes sur le marché du travail à cause de l’augmentation démographique  et à la destruction annoncée de 80 000 emplois.  Une fois encore une intervention de l’État essaie de corriger les effets d’une autre intervention de l’État – un cercle vicieux en mouvement perpétuel. On peut aussi compter sur les tripatouillages habituels des statistiques gouvernementales. Ces comptes d’apothicaire sont bien dans la manière de l’homme aux cheveux teints. Mais en économie comme en esthétique, les postiches ne réparent pas des ans l’irréparable outrage.

Pour qui aurait-on voté si, à la fin de la dernière campagne présidentielle, le même Hollande nous avait avoué que son ambition  et « toutes nos forces » seraient tendues vers le « seul » but d’inverser la courbe du chômage dix-huit  mois après son élection, alors qu’il  promettait  le  changement pour maintenant ? Tout chômeur supplémentaire en 2013 sera la victime de la mauvaise politique économique qui a pour nom « hollandisme ».

L’un des lieux communs de l’anticapitalisme français veut que l’économie de marché soit  « court-termiste », aveuglée qu’elle serait par une course cupide au profit le plus rapide possible. Mais que dire de la plus haute autorité de l’État dont l’horizon est limité par la formule « d’ici un an », digne d’un crédit revolving ? François Hollande, comme tout politicien, cherche à gagner du temps, une fois qu’il est au pouvoir,  à repousser les échéances d’un an l’autre, d’un mois l’autre. Le malheureux a dû se placer lui-même en première ligne après avoir nommé à Matignon un zéro pointé, quinquennat oblige. À quoi servirait-il de soustraire un chiffre nul ? Le Président compterait-il alors dissoudre l’Assemblée nationale pour parvenir au terme de son mandat ? Aura-t-il recours à un référendum sur un sujet ad hoc pour redorer son blason ?

En tout cas, gageons que, même si la courbe du chômage est inversée, le nombre des sans-emplois restera supérieur en 2017, quand Hollande sollicitera un second mandat, à ce qu’il était en 2012. Un nouvel étiage dans la montée du chômage de masse aura été franchi. Malédiction sur  nous !

Chômage ou esclavage, le dilemme français a sa propre dialectique. À préférer le chômage à l’esclavage, beaucoup de nos concitoyens amplifient la terreur d’être virés dans le camp de ceux qui ont encore un emploi. De sorte que plus il y a de chômeurs, et plus il y a d’esclaves, et plus il y a d’esclaves plus il y a de chômeurs.

L’issue ne peut qu’être tragique dans un pays aussi divisé, aussi disparate, aussi violent que le nôtre. Et c’est pourquoi la prédiction de Pompidou (que ce serait la révolution en France si le nombre de chômeurs atteignait 500 000) risque enfin de se réaliser…

*Philippe Simonnot est ex-professeur d’économie du droit à l’Université de Paris-Nanterre. Il développe dans son dernier livre, Le Dilemme français (éditions Pierre-Guillaume de Roux, sortie en février 2013) une réflexion à la croisée de l’économie et du droit qui permet de mieux comprendre la gravité de la crise qui accable la France et d’indiquer les moyens d’en sortir. Le texte diffusé supra est la conclusion du Dilemme français.

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50 Comments

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  • La Gazelle , 20 janvier 2013 @ 12 h 58 min

    L’étiquette change mais les hommes politiques qui nous gouvernent sont toujours les mêmes depuis plus de 40 ans!
    Ils sont intéressés principalement par le pouvoir pour les avantages personnels qu ils en tirent.
    Nous ne sommes pas en démocratie mais en oligarchie bien vérouillée pour que le bon peuple ne puisse rien faire contre eux. Cest le règne des lobbies et des puissances occultes.
    Il serait vraiment temps de réfléchir à une nouvelle constitution qui nous épargnerait ce genre d individus, la plupart ” coquins et copains ” se tenant tous” par la barbichette ” et que l intérêt du citoyen et du pays n intéresse pas réellement.
    (Voir les recherches et les réflexions intéressantes d Etienne CHOUARD au sujet d une nouvelle constitution).
    Aux armes citoyens et que vive la France !

  • GAUTHIER , 20 janvier 2013 @ 13 h 10 min

    Hollande chasse le Snark et, si, ce qui est très vraisemblable, celui-ci est un Boujeum, alors, nous disparaîtrons…

    :-)

    Ceux qui se rappellent les débats économique des années 60-70 se souviennent du fameux NAIRU, tout aussi étrange que le Snark de Lewis Caroll….

  • domremy , 20 janvier 2013 @ 13 h 31 min

    A PHILIPPE LEMAIRE; la lecture de votre commentaire me fait du bien, j ai du mal a comprendre que tant de lecteurs ne veulent pas admettrent que NS ‘(pour qui j ai vote) est le premier responsable de tous nos déboires, que tant d autres considérent que MARINE est vraiment le diable et ne veulent pas peser le pour et le contre; si nous avions une vraie droite qui pense au peuple,nous n aurions pas besoin du FN

  • flammande , 20 janvier 2013 @ 13 h 48 min

    L’UMPS : entreprise de démolition de la Maison France… Nous y sommes presque ! Le peuple en très bonne voie de complet remplacement… L économie exsangue… Les valeurs niées… L espoir
    en berne… L U. E. enlisée mais qui continue à saigner les peuples… L islamisme partout… Seule la finance internationale triomphe !

  • Gérard(l'autre) , 20 janvier 2013 @ 14 h 47 min

    “Une stature présidentielle” ….. il en faut … pour faire des excuses à l’Algérie … au nom de la France !
    Excusez du peu … mais dans ce cas … ou bien c’est lui qui n’est pas français … ou bien c’est moi !
    Mais je sais que c’est lui !
    Pourquoi vouloir absolument comparer deux “dhimmis” … au lieu de faire référence à de VRAIS représentants de la France ?

  • domremy , 20 janvier 2013 @ 15 h 08 min

    nous ne sommes pas en démocratie, c est vrai,

    mais combien de Français s interessent a ce qui se passe dans notre pays????
    bien peu suivent l actualité,, ils se plaignent, mais ne font pas d effort pour comprende, préférent les sports, les jeux vidéo
    donc les copains coquins font ce qu ils veulent s en risque d être balayés

  • artiste , 20 janvier 2013 @ 15 h 47 min

    La poilitique économique de M.LEPEN est stupide , sortir de l’euro ou accepter une europe fédérale sont les deux seules solutions mais fermer les frontiéres n’ a aucun sens
    seule une réforme profonde de l’état et une coupure des liens banques/etat aurait du sens mais trop de gens en vivent encore bien dont la classe pôlitique de tous bords,le système ne se réformera que quant il ne sera défintivement plus viable à l’instar de l’URSS hier, en attendant si vous ne faites pas partie de cette “noblesse d’aujourd’hui” vous allez devoir payer si vous ne pouvez pas fuir ce qui reléve de la légitime défense

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