« Enfant de France, n’oublie jamais les dix frères Ruellan » (1/2)

La plus grande fratrie durant la Grande Guerre : centenaire de consciences engagées usque ad ultimum spiritum

« Enfant de France, n’oublie jamais les dix frères Ruellan »

Pourquoi le ministère de l’Education nationale fit appliquer cette sentence dans toutes les écoles de France ? Cela, c’était en 1938, et c’était pour éduquer les consciences, donner des exemples à la jeunesse française et honorer nos héros nationaux.

Et pourquoi, à l’heure où nous commémorons le centenaire de la Grande Guerre – ce long centenaire qui dure cinq ans- les ministres laissent-ils désormais ces héros nationaux aux oubliettes ?

Au départ, il y a Jules Ruellan et Marguerite du Rivau : un couple jovial, un couple de fervents catholiques élevés dans l’amour de la France éternelle. Puis de ce foyer naîtront ceux qui deviendront « les dix frères Ruellan ». Une fratrie nombreuse entièrement mobilisée à l’appel de la patrie attaquée. Une fratrie dans laquelle la conscience individuelle et collective éclairera un engagement immédiat, promptement mis en œuvre, entier, constant et sans faille.

Mobilisés, jusqu’au bout.

17 février 1915. A 27 ans, d’une balle en plein cœur, il y juste a un siècle, Bernard Ruellan tombait au champ d’honneur.

Parce qu’il fut le premier à tomber, il versa son sang sans avoir eu d’abord à verser des larmes pour chacun de ses cinq autres frères qui le suivront dans la mort au combat.

Qui sont ces frères Ruellan qui, chacun selon son devoir d’état respectif avant-guerre, étaient déjà militants pour la foi et pour l’honneur ?

Qui sont ces frères Ruellan qui suscitèrent la vocation militaire d’un autre héros, Hélie Denoix de Saint Marc, qui fut leur neveu ?

Pourquoi ont-ils naguère été élevés à la mémoire nationale auprès de tous les écoliers et pourquoi sont-ils aujourd’hui réservés à la mémoire privée ?

Pourtant, à Saint Malo – et ils ont cela en partage avec Chateaubriand – subsiste la stèle en hommage aux frères Ruellan, la fratrie la plus nombreuse fauchée par la Grande Guerre. Ce n’est pas par la plume ni avec de l’encre, mais c’est par les armes et de leur sang qu’ils ont participé à la formidable épopée nationale, qu’ils ont contribué au grand récit de l’histoire de France.

La stèle se situe rue des six frères Ruellan, sur leur ancienne maison, devenue aujourd’hui une bibliothèque municipale de st Malo.

Enfants de France, pourquoi l’actuel ministère de l’Education nationale a-t-il oublié les dix frères Ruellan ?

Bien pire que l’oubli, il y a encore la falsification. La première est une ingratitude. La seconde est une malhonnêteté. Lorsque des officialités exaltent devant les monuments aux morts chaque 11 novembre le souvenir et parfois la gloire de ces « soldats morts pour la République », et morts pour « les valeurs de la République », ils cherchent à se rendre hommage à eux-mêmes en récupérant sans vergogne le sacrifice de nos morts. Pourtant, dans chaque ville, dans chaque village, les enfants qui sortent de l’école en parvenant à lire et qui s’arrêtent un instant devant la litanie des morts de leur commune le voient bien profondément gravé sur les monuments aux morts : « morts pour la France », ou « mort pour la Patrie ».

France, Patrie. Deux morts trop durs à prononcer pour certaines élites.

Pourtant, ils se sont battus pour la France, leur patrie dont ils savaient qu’elle réunit les mânes des morts qui nous précèdent, les vivants qui partagent les destinées d’une même époque, et ceux qui ne sont pas encore nés et qui se nourriront de la paix ou des conflits que leurs aînés leur préparent.

Rarement une patrie trouva une telle destinée de vaillance et de générosité au sein d’une même famille. Tels les frères Macchabés de l’Ancien Testament, ils s’engagèrent tous pour se battre pour leur terre et leur foi.

Ces frères de sang, après avoir partagé le même foyer familial, le même amour du pays charnel et spirituel, amour de leur terre et de leur nation, de leurs traditions et de leur religion, eurent encore à partager en famille les mêmes affres et les mêmes lauriers. La gloire leur avait en effet préparé un large rameau, dont ils furent dignes.

C’est parce qu’en eux se trouvent la plus grande fratrie française qui fit un tel sacrifice qu’on se recueille avec respect, et avec en mémoire toutes les autres victimes mais aussi tous les combattants qui en réchappèrent.

Pourquoi donc leur mémoire est-elle délaissée aujourd’hui par le pouvoir ? Laissons le souvenir des Ruellan répondre de lui-même, car des frères Ruellan, si des historiens pourront peut peut-être dire qu’ils sont morts « par la République », on ne pourra jamais dire qu’ils sont «morts pour la République », à moins d’une pure et simple calomnie.

Les origines

Ruellan, un patronyme simple et répandu en Bretagne : la famille Ruellan est une famille de notables établie à Saint Malo, où Jules, le père, est armateur. Marguerite du Rivau, la mère, est issue d’une ancienne famille, déjà marquée par l’esprit de service et visitée par la renommée, et ayant fait souche en Sarthe. Ce couple de caractère à la fois gai et engagé donnera un beau foyer, fécond de dix-huit enfants avec une seule mort en bas âge.

Jules est un homme d’affaires bien occupé qui trouve pourtant, en sus de ses devoirs familiaux, à s’engager dans de nombreuses bonnes œuvres : conférence St Vincent de Paul, conseil de fabrique, comité des écoles libres, conseiller municipal de St Malo, membre du Tribunal de commerce … Marguerite veille sur tous les soucis domestiques et surtout sur l’éducation de ses enfants qui passèrent l’essentiel de leur scolarité en Sarthe, son pays d’origine : plusieurs des filles au Sacré Cœur du Mans, les garçons à Notre Dame de Sainte Croix. Durant quinze années, huit des frères usèrent leur fond de culotte dans cette école qui admit, une génération plus tard, un autre élève entré lui aussi dans l’épopée nationale : Antoine de St Exupéry…

Cette grande famille est animée de toutes les joies et les peines qui font la vie de famille. Elles sont vécues avec bonté, parfois avec les débats animés des hommes de caractère, toujours avec le sourire et la joie de vivre. Ce creuset d’affection, de dévouement, de tempérament et de piété préparait les vaillants combattants qui se révéleront lorsque sonnera la mobilisation générale.

Mais en réalité, ni le père, ni la mère, ni les garçons, ni les filles n’attendirent la guerre pour se battre pour le redressement de leur pays, que ce soit par leur prière ou par leurs engagements.

En 1905 par exemple, au moment de la loi dite de séparation de l’Eglise et de l’Etat, Stanislas et André se retrouvèrent dans une manifestation de protestation. Ayant agi contre cette loi qui prétend opposer le civil et le religieux en reléguant l’Eglise à la sphère privée, André fut jugé pour avoir d’un cop d’indignation et de colère… frappé le cheval d’un gendarme. Condamné pour ce crime très grave à seize francs d’amende, il refusa tout net de payer à l’Etat ce qu’il a défendu comme revenant à Dieu et il ne purgea son injuste amende que par peine de corps, par journées de prison, et encore ne s’y rendit-il pas de lui-même mais fallut-il qu’on vint le saisir à domicile avec escorte de gendarmes…

Xavier, quant à lui, fut condamné à six jours d’arrêt à la prison de St Malo pour avoir sans doute trop fermement manifesté sa réprobation à un commissaire chargé de l’exécution des inventaires.

Jean-Berchmans, pour sa part, manifesta à Paris au mois de février 1911 contre une pièce de théâtre d’un auteur qui provoquait le scandale. La Comédie française à cette époque avait en effet admis à se produire sur sa scène un écrivain qui revendiquait avoir déserté. Des manifestations se tinrent pour que la Comédie française ne partage pas son prestige national avec un déserteur et pour exiger le retrait de la pièce. Participant à toutes les manifestations de protestation, six ou sept environ, Berchmans fut arrêté à chacune d’entre elles et conduit au poste.

Dans cette famille, tous étaient profondément royalistes. Et de ces royalistes qui s’opposent à la République anticléricale et déjà anti-chrétienne. Tous sauf Julius, qui devint prêtre et fut quelque peu gagné par les utopies modernes, sous l’influence du mouvement « le Sillon ». La guerre plus tard lui fit voir en face quelques vérités sur la politique et les hommes, ce qui le rendit plus réaliste.

La mobilisation générale

Dès le début de la guerre, le choix des de la fratrie fut unanime et inconditionnel. Les treize enfants qui étaient encore en vie en 1914 s’engagèrent chacun selon sa manière. Ce choix fut réfléchi si on en juge par les sacrifices qu’il suscita dès l’engagement. Deux des frères par exemple, émigrés en Amérique pour faire affaires, répondent aussitôt à la mobilisation générale. Abandonnant ses affaires après des années d’investissements au moment où elles allaient commencer à porter leur fruit, Stanislas abandonna tout pour rentrer en France. Quant à André, établi en Uruguay, il chercha aussitôt à embarquer au plus vite pour rentrer et encourut dès l’océan les périls de guerre, le navire où il avait réussi à embarquer ayant été pris en chasse par un croiseur allemand.

Tous se mobilisèrent, même Auguste pourtant affaibli par la maladie et qui fut le seul des dix frères à ne pas avoir pu combattre sur le front. Les trois sœurs répondirent également à la mobilisation et revêtirent l’habit blanc des infirmières durant toute la guerre.

Dans le journal L’Action françaises, dont les Ruellan étaient des abonnés fidèles, la mort de chacun d’eux fut rapportée dans la nécrologie. La guerre fait des morts et des orphelins et Charles Maurras fit à plusieurs reprises un appel aux dons à ses lecteurs, qui y répondirent très généreusement, pour l’orphelinat dans le bordelais dont s’occupait Madame Xavier Ruellan. Maurras au sujet des Ruellan : «une race de braves qui avec tant de douleurs continuent avec obstination à se battre, à faire le
bien, à servir ».

Comme une dizaine qu’on égrène.

Quant à nous, pour honorer la mémoire de ces dix combattants, dressons simplement une liste simple comme on égrène une dizaine de chapelet, et ponctuons-là de quelques lignes tirées de leur propre plume qui révèlent bien leur qualité d’âme.

A suivre…

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16 Comments

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  • 0 / 10
  • FLANDRE , 20 février 2015 @ 9 h 45 min

    Envisagez-vous, un seul instant, que la Ripoublique Socialiste honore une famille de Français de souche, blancs, vraisemblablement de droite et catholique fussent-ils de vrais héros ?

  • OFMAR , 20 février 2015 @ 10 h 07 min

    Pas un instant. Pendant que je portais les armes de la France, une belle brochette des ces suppôts portaient des valises destinées à l’ennemi. Saleté de mémoire….

  • Catholique & Français , 20 février 2015 @ 10 h 12 min

    Merci pour cette belle page ! Cela fait beaucoup de bien dans l’époque de pourriture que nous vivons. Merci également de rappeler que tous ces Catholiques (de la Foi d’avant Vatican II, celle qui s’opposa énergiquement aux lois de 1905…), tous ces gens de droite, d’Action française et tous ces gens de bien sont morts en 14-18 pour la France et non pour cette république infâme. Ultime abjection, cent ans après leur sacrifice immortel, “ils” essaient AUSSI de leur voler leur mort afin de l’utiliser pour leurs magouilles et leurs combines. Sales vautours !

  • Jean53 , 20 février 2015 @ 10 h 54 min

    Encore actuellement nos politiques font leur promotion sur le dos des victimes, le 11 janvier
    ne vous rapelle rien? En effet ,dernièrement valls invité sur TF1 nous le faisait remarquer
    afin de faire passer la loi Macron.

  • hectorgalb , 20 février 2015 @ 13 h 27 min

    J’ai lu dans le ouest france que les franc maçons du coin avaient fait quelques crasses aux Ruellan après guerre.

  • Caroline , 20 février 2015 @ 15 h 00 min

    Merci pour cet article

  • Koopa Troopa , 20 février 2015 @ 16 h 38 min

    Inclinons-nous devant cette famille décimée, ces royalistes morts pour la République et ces catholiques morts pour la franc-maçonnerie… Et pendant ce temps-là, à l’arrière, les Louis-Dreyfus, Citroën et autres amassaient de colossaux profits de guerre…

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