CGT : grève devant, détournement de fonds derrière

L’affaire Bygmalion n’en finit plus d’occuper les colonnes des journaux. Ce qui, au départ, était une histoire de collusions et de petits contrats entre amis s’est rapidement mué en gros détournement entre mafieux de la politique. Et il y a d’autant plus d’articles que cette affaire mouille directement des éléphants de l’UMP, jusqu’à l’ex-président Sarkozy. C’est un feu d’artifice. Maintenant, ne cache-t-il pas une autre affaire, au moins aussi gênante dans ce qu’elle implique ?

On me dira que c’est assez improbable compte tenu de l’ampleur des allégations soulevées par différents organes de presse, à commencer par l’inénarrable Mediapart qu’on voit pointer son nez à chaque fois qu’il est question de s’en prendre à Nicolas Sarkozy. Si, de mon côté, je trouve tout cela particulièrement amusant (n’ayant jamais eu le moindre doute sur la capacité naturelle de tous les politiciens, parvenus à un certain niveau, à empiler malhonnêteté sur malversations, magouilles et tromperies), je ne peux m’empêcher de noter la constance étonnante de cet organe à s’en prendre spécifiquement à l’ancien chef d’État au point que, de loin, on pourrait y voir une vendetta personnelle.

Compte tenu des faits rapportés, qu’une enquête — judiciaire cette fois-ci — permettra de confirmer, il apparaît évident que cet acharnement n’est en rien déplacé. Tant qu’à faire, si on peut s’éviter un nouveau quinquennat d’effervescence inutile, c’est toujours bon à prendre. On regrette cependant que, symétriquement, les mêmes énergies ne soient pas dépensées pour faire jaillir toute la lumière (à commencer par la lumière médiatique, parfois nécessaire à la révélation de l’ampleur des corruptions) sur une autre affaire, qui le mérite amplement.

Parce que pendant que la presse s’empare largement du sujet Bygmalion et qu’elle détaille, force graphiques à l’appui, les petits et gros arrangements avec la légalité de l’UMP, on ne voit malheureusement guère d’articles aussi fouillés, aussi documentés et aussi généreusement illustrés par la fine fleur du journalisme d’investigation lorsqu’il s’agit de relater le procès qui a actuellement lieu, pour les malversations du Comité d’Entreprise d’EDF/GDF, qui implique (excusez du peu) la CGT et l’Humanité (oui, le débris journalistique qui ne survit que grâce au capitalisme).

Vous n’en avez pas entendu parler ? C’est normal. Par un hasard extrêmement curieux pour une presse française qui déclenche la jalousie partout dans le monde pour sa pertinence, rares sont les articles détaillant ce qui se passe exactement, alors qu’en réalité le procès n’est que l’aboutissement de dix longues années d’enquêtes, de procédures et de révélations. Et au final, seize personnes, la CGT, le PCF ainsi que la société du journal L’Humanité sont jugés depuis le 5 juin dernier pour abus de confiance, recel ou complicité, pour avoir détourné des fonds provenant du Comité d’entreprise d’EDF-GDF, la Caisse centrale des activités sociales (CCAS). Ces détournements auraient servi à financer des prestations à la Fête de l’Humanité, des emplois fictifs au bénéfice de la CGT et de la Fédération des mines et de l’énergie (FNME-CGT) ou encore des périodiques proches du PCF et de la CGT.

Oh, bien sûr, on trouvera bien quelques dépêches ici ou là, un article du Figaro ou du Parisien, ainsi que quelques articles de la presse étrangère francophone, mais pour les Unes de Libération, Le Monde, Médiapart ou même des précités, il faudra repasser.

Il faudra donc lire chaque petite phrase pour tenter de comprendre les enjeux, et découvrir que, selon l’accusation, une association de formation financée par la CCAS aurait, par exemple, filmé des spectacles lors de la fête de l’Humanité pendant plusieurs années pour un coût totalisant les 1,2 million d’euros, ou qu’une employée rémunérée par la même CCAS aurait en réalité travaillé pour la fédération communiste des Hauts-de-Seine.

Ici, le fait que tous ces accusés soient franchement orientés à gauche, que la presse soit reconnue comme majoritairement à gauche, que des artistes (subventionnés ou salariés) soient impliqués, que des syndicats qu’on retrouve actuellement dans les grèves les plus amusantes du moment, toutes ces similitudes avec des comportements mafieux et des associations habituelles de malfaiteurs existants ou ayant existé ne sont que des coïncidences fortuites et aucun animal n’a été blessé dans la réalisation de ces magouilles fermez le ban et n’en parlons pas.

On pourra aussi s’attarder quelque peu sur les déclarations hallucinantes de l’ancien président d’EDF, François Roussely, du juriste Antoine Lyon-Caen et celles de l’historien du syndicalisme et des mouvements sociaux, Michel Dreyfus, qui, convoqués à la barre, ont cru nécessaire de rappeler l’historique de la Caisse pour expliquer ces errements dont on commence à peine à mesurer l’ampleur.

« La CCAS n’est pas un comité d’entreprise, même si le législateur a essayé ces dernières années d’insérer cette institution originale dans le cadre général des entreprises privées. »

Eh non. En fait, c’est un gros tuyau. D’un côté, on met l’argent récupéré des Français lorsqu’ils paient leurs factures de gaz ou d’électricité, et de l’autre, on récupère des journaux communistes, des syndicalistes communistes, des emplois dans des fédérations communistes qui, tous, participent à la bonne introduction du communisme, du collectivisme et de la doxa socialiste dans l’esprit des Français, pour leur plus grand bien. Ce serait, effectivement, dommage d’appeler ça un Comité d’Entreprise alors que c’est beaucoup plus !

« La CCAS c’est une institution de notre République qui lui a fourni des ressources exceptionnelles (son budget est alimenté par 1% du produit des ventes de gaz et d’électricité) à une époque où le facteur travail était aussi considéré que le facteur capital .»

Eh oui, la CCAS, ce n’est pas une association permettant d’acheter du loisir pour les salariés d’EDF et de GDF. C’est aussi une institution de la République, qui, même si elle n’est ni démocratique, ni de service public, rend un fier service au syndicalisme et à tout ce qui gravite autour en lui fournissant … des moyens, tiens pardi ! C’est beau comme une facture Bygmalion.

Bref : il semblerait que les montants, pourtant copieux (on dépasse le million rien que pour la partie « Fête de l’Humanité ») ne justifient pas pour les médias de s’intéresser à l’affaire. Du reste, on se souvient que tout ce qui avait entouré, en son temps, la sortie duRapport Perruchot avait été soigneusement évité par la presse (largement tenue coite par le Syndicat du Livre CGT – coïncidence toujours). De la même façon, les malversations répétées rapportées tant par le Canard enchaîné que par la Cour des Comptes au sujet des syndicats font généralement peu de vagues ; au-delà du petit article dans l’un ou l’autre quotidien, chaque scandale, même de nature très scabreuse, ne déclenche tout au plus qu’une petite bordée de titres timides avant que l’actualité (politique, sociale) reprenne le dessus bien sagement.

Le fait que cette affaire-ci mouille, encore une fois, des gros syndicats, des groupuscules gauchistes bien introduits et des grosses sociétés anciennement nationalisées et encore bien acoquinée avec l’Etat de nos jours semble agir comme un repoussoir magique à toute médiatisation. Ainsi, comme le remarque Contribuables Associés, le Comité d’entreprise de la SNCF nage dans une certaine opulence qui lui permet de venir en aide à la CGT dans des proportions qu’on pourrait qualifier de louches. Là encore, verra-t-on Mediapart sortir du bois et agiter ses enregistrements exclusifs sur les internets pour enfin démasquer les fraudeurs de ce syndicat ? Le Monde ou Libé vont-ils mener l’enquête ?

N’y comptez pas.

> H16 anime un blog.

Related Articles

12 Comments

Avarage Rating:
  • 0 / 10
  • Daniel D , 21 juin 2014 @ 11 h 07 min

    Votre commentaire est excellent et fait suite à un article qui l’est également. Mais pour l’instant les gens lucides sont éparpillés et seuls: ils sont normaux; et leur discernement est généralement le résultat de longues années de responsabilités assumées à leurs propres risques!.
    Sauf que la société est organisée pour n’entendre que les groupes assez puissants pour imposer leur voix et que les médias vivent des problèmes. Politiciens et médias, c’est un beau couple par intérêt commun contre l’intérêt général. Sans problèmes et sans perversions légales avec un Etat qui jouerait son vrai rôle, plus d’intérêts à acheter un journal. Ils y trouvent tous leur compte jusqu’au moment où ils découvriront qu’ils ont cassé le jouet qui les nourrissait. Ça commence à monter au cerveau.
    La comparaison au nazisme (socialisme financé par le capitalisme) est de plus en plus claire et facile à étayer. Je suis personnellement convaincu que c’est cette comparaison qui va déclencher une masse de résistants de la dernière heure. Parmi eux, les médias se feront un devoir de laisser penser qu’ils ont toujours été du côté du peuple. Et le peuple qui a délégué son avenir et abandonné sa vie pour la confier à des escrocs en échange de vacances et de tranquillité doit payer cette erreur assez cher pour connaitre le prix de vivre et ne pas se contenter de litanies.

  • monhugo , 21 juin 2014 @ 13 h 26 min

    “COsa nostra”…. ou “notre Chose” – principale version de la “Pieuvre” en Sicile. Pas “CAsa nostra”…Et la “CamoRRa”, version napolitaine (et donc urbanisée, quand “Cosa nostra” est d’origine rurale) de la mafia.
    Il ne faudrait pas oublier la plus redoutable de toutes les mafias, la “‘Ndrangheta” calabraise…. La mafia, ce n’est pas que du business (sale), ce sont aussi des crimes de sang. Si l’on tente un parallèle avec la classe politico-médiatique, et en France, comment distribuer opportunément les rôles ?…

  • agathon , 22 juin 2014 @ 9 h 08 min

    Je ne comprend pas pourquoi on a tronqué mon commentaire de sa fin, donc de son sens:

    “Alstom est donc livré sur un plateau d’argent; A quand le transport ( branche d’Alstom) l’industrie de l’Armement, le système bancaire ( l’affaire de la BNP n’est qu’une mise en bouche) le retraitement nucléaire (AREVA), toutes ces industries dont les présidents figurent dans les listes de Young leaders de la French American Foundation, dirigée par l’oligarchie financière atlantiste de la haute trahison, servie par nos carpettes légales. ”

    ” Nous ne sommes pas là seulement pour défendre nos propres concitoyens” Hollande novembre 2011 ”

    Est ce à cause de ce que je prédis? Cela fait 5 ans qu’aucun des mes écrits ni qu’aucunes de mes prévisions n’ont été démentis dans les faits .

    Est ce à cause du constat qu’effectivement notre pays est livré aux “carpettes légales”? carpettes de l’Amérique en Libye, en Syrie, en Ukraine…. et en France aujourd’hui, comme hier au détriment des français; ce n’est ni une insulte, ni un défoulement , mais un constat annoncé en son temps. A-t-on peur dans ces colonnes de la vérité qui s’exprime ?

    Est ce à cause de la phrase qui assassine la France, prononcée chez Taddei? A-t-on peur de dévoiler ceux qui dévoilent leurs funestes intentions?

    Sur ces 3 points censurés je persiste dans ma prévision et signe: la République qui n’a plus rien à voir avec la chose du peuple est en train de brader le patrimoine que nos parents ont payé de leur sang et si on n’a pas le droit de le dire ici , où pourra-t-on le dire?

    Attend-t-on que la France devienne l’Ukraine?

    « La France ne le sait pas, mais nous sommes en guerre avec l’Amérique. Oui, une guerre permanente, une guerre vitale, une guerre économique, une guerre sans mort…apparemment. Oui, ils sont très durs les Américains, ils sont voraces, ils veulent un pouvoir sans partage sur le monde… C’est une guerre inconnue, une guerre permanente, sans mort apparemment et pourtant une guerre à mort !” c’est la seule vérité qu’à sorti Mitterrand.

  • pas dupe , 22 juin 2014 @ 12 h 45 min

    Et pendant ce temps là, en violation des accords passés entre l’état et l’Eglise, son patrimoine religieux est sacrifié !!!!!!!
    Les magistrats qui sont entrés dans cette manipulation pour atteindre l’Eglise devront être jugés !!

    “L’église Sainte-Rita bientôt remplacée par des logements sociaux et des parkings…”
    http://www.bvoltaire.fr/annelauredebaecker/leglise-sainte-rita-bientot-remplacee-par-des-logements-sociaux-des-parkings,53207

  • xanur , 22 juin 2014 @ 21 h 29 min

    Je vois pas en quoi le rachat par Siemens (en fait Mitsubishi) aurait été plus profitable.
    Siemens s’apprête à licencier plusieurs milliers de travailleurs de sa branche énergie suite à la baisse de son activité dans le domaine nucléaire ( du à la politique allemande de retrait du nucléaire).
    Croyez vous que les emplois français auraient été protégés ?

Comments are closed.