1984 ou Le Meilleur des Mondes ?

Tribune libre de Christian Vanneste*

Le nourrisson enlevé à la maternité de Nancy, le petit Lucas, a été retrouvé grâce à la vidéosurveillance installée sur le tramway de cette ville. Une femme, très jeune, mais vivant déjà en couple avec un « compagnon », avait été jusqu’à enlever l’enfant d’un autre couple pour satisfaire un désir de maternité. Pendant ce temps, dans sa fureur idéologique, le PS débat de l’introduction de la procréation médicalement assistée dans la loi de dénaturation du mariage. Ces évènements appellent de ma part trois réflexions.

D’abord, j’ai toujours été frappé par l’hostilité de la gauche au développement des techniques nécessaires à la lutte contre la délinquance, que la science rend de plus en plus efficaces. La vidéoprotection, mais aussi les fichiers et leur croisement éventuel, l’utilisation des analyses d’ADN, ou encore l’instauration d’un registre national, qui sont utilisés dans d’autres démocraties européennes n’ont jamais manqué de soulever les protestations de la gauche au nom de sa curieuse conception de la liberté. Curieuse liberté,en effet, que celle des délinquants et des fraudeurs au détriment de celle des autres ! Je me souviens avoir, dès les premiers débats, dit à une collègue socialiste que, si, elle, avait à craindre quoi que ce soit, mon comportement public, me donnait toute tranquillité. Notre société par les extraordinaires moyens de communication qu’elle a élaborés offre une liberté de circulation des personnes, des biens et de l’argent qui exige un contrôle qui en compense les dangers, et qui est d’ailleurs étroitement limité par la loi. Néanmoins, les socialistes continuent à brandir 1984 et Big Brother pour effrayer la place des Vosges et faire s’étrangler les lecteurs de Libération et du Nouvel Obs. Ils n’oublient qu’un détail : Orwell, qui était intelligent, avait perçu les dangers du communisme et les dénonçait pour les avoir vécus. Il ne faisait pas partie des compagnons de route dont la gauche française est l’héritière. 1984, c’est la dictature stalinienne qu’aimait Aragon et que n’a pas condamnée Sartre, ce grand admirateur des dictatures communistes exotiques. La démocratie, l’État de droit ont eux le devoir de se doter d’armes égales à celles qui menacent la sécurité de leurs citoyens.

Curieusement, à gauche, c’est Le Meilleur des Mondes qui est pris au pied de la lettre. Lutte des genres et féminisme obligent : Big Brother, NON ! Big Mother, YES ! Un monde normalisé, à la sexualité libérée, fonctionnelle et protégée, aux rapports adoucis au besoin par la drogue, aux enfants « fabriqués », une vie purement matérielle, depuis la naissance artificielle jusqu’à la mort douce : le cauchemar d’Huxley n’est pas éloigné du  rêve du programme socialiste. Certes, il n’y a pas l’inégalité, mais on peut compter sur l’hypocrisie de la machine scolaire pour la produire « en douce » à la mesure des dysfonctionnements du système que certains connaissent et évitent. La confusion entre la liberté et la transgression est la clef du prétendu progrès sociétal socialiste : transgression des comportements culturels nationaux, de la morale, du sacré, de l’anthropologie, de la nature. Il faut sévir sur le tabac et l’alcool, mais pas sur la drogue. Le mariage est désuet, mais il faut l’ouvrir aux homosexuels. La vie d’un assassin doit être protégée, mais pas celle d’un enfant à naître, ni celle d’un vieillard déprimé. L’anthropologie est fondée sur l’altérité et la complémentarité des sexes qui tissent les échanges matrimoniaux, mais la gauche nous plonge dans la confusion des genres. Enfin, par une curieuse contradiction, la gauche se veut pleine de précautions lorsqu’il s’agit de maîtriser les atomes ou les OGM, mais est prête à négliger les limites naturelles de la procréation dans l’espèce humaine.

Une telle attitude est révélatrice d’un anti-humanisme profond. Il ne peut y avoir d’humanisme que dans le cadre d’une pensée spiritualiste, qui confère à l’homme cet esprit, qui l’élève au-dessus du reste de la nature et trace autour de lui une frontière invisible qu’on appelle le sacré. Les propos scandaleux de Bergé rapportés par Le Figaro et par Nouvelles de France ont le mérite d’indiquer clairement de quel côté de cette ligne se situent les projets actuels : « Je suis pour toutes les libertés. Louer son ventre pour faire un enfant ou louer ses bras pour travailler à l’usine, quelle différence ? » La différence est claire. L’enfant n’est pas une chose que l’on produit pour répondre aux désirs du marché. Le fait que le socialisme rejoigne le libéralisme mercantile ne nous étonne pas. Ce sont les jumeaux nés déjà de deux « pères » : le matérialisme et l’individualisme ! Ce n’est ni notre conception de la Liberté, ni notre conception de l’Homme !

*Christian Vanneste est un ancien député UMP du Nord.

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15 Comments

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  • Gisèle , 20 décembre 2012 @ 23 h 39 min

    @ GOUPILLE J’avais pensé exactement à la même chose que vous ! J’avais autre chose à faire aujourd’hui , sinon je l’aurais écrit .
    Par contre , ce soir , sur la 3 , une pirouette concernant la vente future d’ovocytes .
    Les jeunes femmes de 25 ans vont pouvoir faire congeler leurs ovules pour un usage programmé dans un avenir plus ou moins lointain ….
    Si ça c’est pas une invitation à la vente libre et incontrôlable de pièces détachées pour la PMA !
    Tout ça payé par qui ?? ou quoi ??? l’argent économisé sur les soins palliatifs ou au soins refusés aux malades ???

  • sergeG , 21 décembre 2012 @ 8 h 58 min

    La projet de «  mariage pour tous  » prévoit la suppression des mots père et mère pour les remplacer par parent 1 et parent 2. Autrement dit, quelques personnes, qui par leur choix sexuels ne peuvent procréer, veulent interdire aux autres ce qu’ils ont choisi de ne pas être.
    Dans cette logique, il faut aussi supprimer la notion d’homme et de femme, de fils et de fille pour ne pas heurter les personnes en mal de genre pour les remplacer par des termes génériques asexués. Par exemple homo-sapiens pour les adultes et humanoïdes pour les enfants. Il faudra aussi prévoir la suppression des noms et prénoms pour les remplacer par le numéro de sécurité social amputé de son premier chiffre bien sur. J’imagine la rencontre future entre deux homo-sapiens : T’as de beaux yeux tu sais, comment t’appelles tu  ? Moi c’est quarante quatre onze vingt cinq quatre cent dix huit zéro zéro six. Nous serons ainsi arrivé dans le «  meilleurs des mondes  » comme l’avait imaginé Aldous Huxley.

  • VANNESTE : , 21 décembre 2012 @ 10 h 52 min

    En réponse à Petitjean : J’ai été un opposant de l’intérieur, multipliant les discours et les amendements dissidents. Lors de l’avant-dernière session, j’ai été l’UMP détenteur du record des votes négatifs ou des abstentions. Cette opposition que je voulais constructive a duré trois mandats. La première fois, j’attendais Balladur et j’ai eu Chirac. La seconde, je désespérais de Chirac et j’attendais Sarkozy. Je dois reconnaître que depuis l’ouverture à gauche, je n’attendais plus rien. Mes propositions de loi sur le référendum d’initiative populaire, sur la TVA sociale, sur l’adoption réservée aux couples mariés, contre l’accès des mineurs à la pornographie, sur le travail comme instrument pénal, mes positions sur la règle d’or, sur les retraites à la suédoise, etc… montrent une grande constance. Le résultat est qu’on vous met sur la touche et qu’on finit par vous retirer l’investiture parce que vous vous battez contre le lobby gay que l’UMP soutient de la manière la plus hypocrite : en faisant semblant de s’opposer à la loi, tout en sachant qu’elle sera votée sans retour, en ayant une branche du lobby à domicile avec Gaylib et en assurant la promotion de représentants notoires de ce lobby comme le Président des Jeunes Pops, des députés comme Riester etc..

  • MONGE , 21 décembre 2012 @ 13 h 51 min

    Merci beaucoup pour cet excellent article.

  • passim , 21 décembre 2012 @ 15 h 21 min

    Comme beaucoup de Français, je subits la politique sans en connaître tous les rouages. Votre plaidoyer (“j’ai été un opposant de l’intérieur”) vous honore, mais pour être entièrement convainquant, il faudrait que vous nous expliquiez pourquoi on ne peut pas être un opposant tout court.
    L’adhésion à un parti (en votre occurrence, l’UMP) est-elle la seule voie pour se faire élire ? Ce mécanisme vous paraît-il réellement démocratique ?
    Dans ce cas, pourquoi l’UMP, dans la mesure où vos idées ne pouvaient que vous faire devenir un “opposant de l’intérieur” à ce parti ?
    Vous attendiez Balladur, vous avez eu Chirac, etc. Vous avez rendu votre carte ?
    Si vos convictions sont claires, votre démarche reste ambigüe. A moins de nous expliquer comment fonctionne réellement la machine électorale.
    Je ne vous mets pas en cause personnellement. J’essaie de comprendre, tout simplement.

  • VANNESTE : , 22 décembre 2012 @ 6 h 17 min

    En réponse à Passim. Le moins mauvais des systèmes est la démocratie britannique. Celui-ci est fondé sur le caractère uninominal par circonscription des élections et conduit à une alternance de deux partis dont le spectre est très large, à des changements de politique clairs mais avec une grande stabilité. C’est la raison pour laquelle j’ai toujours milité dans le grand parti de gouvernement de droite en exerçant une pression sur sa droite. Au RPR, c’était possible. A l’ump, qui n’est qu’une agence électorale dirigée par des lobbys et par des “responsables” dont on n’imagine pas la nullité intellectuelle et morale, çà n’a plus été possible. La proportionnelle est un mauvais système pour le pays en raison de son instabilité et pour la démocratie car elle donne trop de pouvoirs aux partis et au plus petit nécessaire pour établir la majorité. Le problème de la France n’est pas le système, mais la qualité déplorable de son personnel politique

  • sergeG , 22 décembre 2012 @ 17 h 16 min

    J’ai été élu régional, Je confirme les propos de M Vanneste. Me dans les tous petits partis politiques, les ambitions sont dévorantes.
    Les partis politiques sont des écuries de courses électorales. Ceux qui sont à la tête n’ont qu’une ambition : eux. Le pouvoir, la notoriété les rends fous.

    L’intérêt collectif ils s’en moquent.
    Une “collègue” m’avais dit “en politique ça ne sert à rien de travailler”.

    Force est de constater qu’elle avait raison. En ne fichant rien mais en étant démagogue avec le peuple, violente et malhonnête avec ses collègues elle a été ministre, sénateur et maire d’une grande ville.

    Personnellement je n’ai pas été réélu.

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