Débat : Vers la Paix au Moyen-Orient ?

Lors de la dernière émission que je dirigeais sur Radio-Courtoisie, le 13 Décembre, le second sujet abordé était la politique internationale, à partir d’un fait : la réussite de la politique russe conduite par Vladimir Poutine en Syrie. Le débat réunissait Madame Nina Monakhova, Premier secrétaire de l’Ambassade de Russie en France, Madame Evelyne Joslain, connue comme spécialiste de la politique américaine et ardente avocate du Président Trump, Charles Millon, Président de l’Avant-Garde, et ancien Ministre de la Défense, Alexandre Del Valle, géopolitologue, et auteur notamment d’un ouvrage essentiel sur le sujet : Les Vrais Ennemis de l’Occident, Denys Pluvinage, éditeur et essayiste qui a écrit Le Siècle Russie, et Elections USA, le spectacle de la démocratie. Un journaliste espagnol José-Maria Ballester est intervenu au téléphone pour donner des informations sur la situation de Cuba, ce vestige fossilisé du communisme, qui est une sorte de témoin de l’évolution des relations russo-américaines.

Les échanges furent riches et parfois vifs. Ils ont à mon sens apporté cinq enseignement principaux.

Madame Monakhova a souligné la volonté de la Russie de parler à tous les gouvernements légitimes et de combattre avec eux l’ennemi commun qu’est le terrorisme. C’est évidemment une manière de condamner la politique occidentale d’ingérence, qui de Bosnie en Syrie, en passant par le Kossovo et l’Irak ou la Libye, a montré sa dangerosité. Il lui a été assez facile de montrer que le processus d’Astana, avec l’Iran et la Turquie, avait permis de progresser vers la paix, quand celui de Genève s’enlisait. Vladimir Poutine, après le succès militaire des forces aéro-spatiales russes, pour appuyer le rétablissement du gouvernement de Damas, veut passer à la solution politique et semble y parvenir, notamment grâce à des relations positives avec l’Arabie Saoudite. En excluant les groupes terroristes, c’est l’ensemble de l’opposition syrienne qui est invitée à rencontrer le gouvernement syrien à Sotchi. Madame Monakhova a également rappelé les bonnes relations avec Israël dont 20% de la population viennent de l’ancienne URSS.

Madame Joslain a tenu à rappeler que la victoire était aussi américaine. Elle a surtout à juste titre dénoncé le rôle calamiteux joué par Obama durant ses deux mandats : le retrait intempestif d’Irak a saboté le rétablissement de la situation militaire sur le terrain opéré par l’opération « Surge » ; le soutien irresponsable au prétendu « Printemps arabe » a conduit à jeter toute la région dans le chaos ; la faiblesse de la politique menée envers des régimes, comme ceux d’Iran ou de Cuba, les a renforcés au lieu de les faire évoluer. Elle a aussi pointé les difficultés injustifiées auxquelles se heurte le Président Trump, qui sont suscitées par les manœuvres démocrates qui tendent à défaire sur un terrain judiciaire dénué du moindre fondement ce qui a été obtenu par les élections.

Denys Pluvinage a mis l’accent sur un aspect souvent méconnu de la politique américaine et qui est plus visible aujourd’hui au travers des entraves que rencontre le Président Trump que certains rêvent de destituer. En fait, il y a peut-être plusieurs politiques américaines. Sur le terrain syrien, certains groupes rebelles ont ainsi été soutenus par la CIA, tandis que d’autres l’étaient par le Pentagone. Il est vrai que le constat n’est guère favorable aux Etats-Unis : si la Russie parle à tout le monde, il semble, hélas, que les États-Unis ne parlent pas d’une seule voix. Si l’on écarte le parti-pris hostile des médias français à l’encontre de Donald Trump, il faut reconnaître à celui-ci un certain courage. Ainsi, la décision d’implanter l’ambassade américaine à Jérusalem date de 1995. Il serait en fait le premier à tenir la promesse formulée à nouveau durant sa campagne, et que ses prédécesseurs n’avaient pas eu le cran de réaliser.

Alexandre Del Valle a une fois de plus mis en lumière la collusion entre les États-Unis et l’Arabie Saoudite et, à travers celle-ci, pointé le cynisme américain. Ce n’est pas selon lui pour exporter la démocratie dans le monde arabe que les néo-conservateurs américains ont voulu abattre le régime de Saddam Hussein. La vielle alliance du Quincy entre Rooseveelt et Saoud, protection contre pétrole, ne s’est guère souciée du wahhabisme saoudien. Le soutien de Washington à Ryad contre Téhéran consiste à préférer un régime qui ignore ses minorités et où on ne vote pas à celui qui les reconnaît, même s’il n’est pas une démocratie où le peuple qui vote serait souverain. Peut-on choisir entre la peste et le choléra ? Le but des USA était, selon lui, de recomposer l’équilibre politique de la région, en faisant apparaître un nouvel Etat, le Kurdistan. Celui-ci existe de fait en Irak. La présence des Américains aux côtés des prétendues FDS en Syrie, c’est-à-dire des Kurdes syriens semble aller dans ce sens.

Enfin, Charles Millon a voulu voir dans la phase actuelle un retour au réalisme. D’une part, l’illusion, sincère ou non, d’exporter la démocratie s’est dissipée. D’autre part, l’irénisme qui voulait ne pas percevoir la réalité idéologique de l’islamisme, le totalitarisme djihadiste, a laissé place à un pragmatisme qui veut trouver les moyens de la paix en essayant sans préjugés de corriger les erreurs commises depuis au moins trente ans. Par exemple, il n’est pas exclu que le fils du Colonel Kadhafi joue un rôle dans la solution libyenne qui passe par un accord essentiellement tribal. Le Printemps arabe a été catastrophique. Les rêves de paradis sont souvent les voies de l’enfer. La politique doit en rester aux faits. Des hommes politiques comme Poutine et Trump sont sans doute heureusement adeptes, l’un et l’autre de ce principe.

Cet échange, finalement assez favorable à Poutine et à Trump, nullement agressif envers Bachar Al-Assad ou l’Iran, a permis de s’évader de la désinformation quasi-systématique qui sévit dans la plupart de nos médias. L’idole Obama est l’un des grands responsables du chaos, et de ses conséquences fâcheuses en Europe, avec la vague migratoire. Son imitateur local, notre Président, qui veut s’attribuer une part de la victoire en Syrie, devrait se faire plus modeste en raison du rôle tenu par notre pays dans le soutien aux rebelles syriens. Il faut aujourd’hui souhaiter que la politique menée par le Président russe aille jusqu’à son terme et qu’elle puisse trouver un équilibre avec celle du Président Trump. Le fait que l’armée syrienne et les FDS aient pu combattre l’État islamique, chacun d’un côté de l’Euphrate, sans se battre entre elles permet de l’espérer.

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