Y a-t-il de l’or dans nos poubelles ?

770 millions de tonnes de déchets ont été produites en France en 2009. Devant de tels chiffres, se pose la question de leur gestion. Par quels procédés pouvons-nous les transformer en matériau propre et utile ? La valorisation serait-elle la solution la plus écologique et intelligente au problème ?

Valoriser des déchets, pourquoi ?

La valorisation des déchets comprend différents processes (recyclage, régénération, réutilisation…) et définit l’ensemble des procédés visant à transformer un déchet en un nouveau matériau ou un nouveau produit. En France, la démarche citoyenne et quotidienne du recyclage n’atteint pas les scores de ses voisins européens, avec seulement 37% des déchets ménagers recyclés correctement. De gros efforts, en amont avec la réduction des déchets à la source, et en aval, avec la prise de conscience de la part de l’individu, restent encore à faire pour augmenter l’efficacité du geste et son impact environnemental.

Que faire, donc, avec nos déchets ? L’heure, en France et en Europe, est à la recherche de nouvelles sources d’énergies. D’une part, le prix de l’électricité augmentera par tranches de 5% jusqu’en 2015, et d’autre part, il devient urgent de se tourner vers des sources d’énergie autres que le nucléaire. Si le solaire, la biomasse et l’éolien sont cités comme les meilleures énergies renouvelables, on oublie souvent de parler du potentiel énergétique des déchets. Si leur réduction reste une perspective environnementale majeure, leur utilisation hic et nunc peut représenter une source d’énergie qu’on ne peut plus négliger.

L’exemple suédois et les solutions françaises

49% : c’est la proportion des déchets incinérés et transformés en énergie en Suède. Très en avance en matière de recyclage sur ses voisins européens, le pays scandinave montre l’exemple et assure de la sorte 20% du chauffage urbain, en plus des 250 mille foyers alimentés en électricité. La Suède achète même des déchets aux autres pays, comme la Norvège, afin d’avoir suffisamment de matière à fournir à ses centrales de valorisation. En plus de son intérêt environnemental, la transformation des déchets en énergie permet de dynamiser les échanges économiques de l’Union européenne. À titre d’exemple, le commerce des déchets a généré un chiffre d’affaires de 145 milliards d’euros en 2008 au sein l’UE.

La France, pour sa part, n’est pas en reste. Des entreprises hexagonales sont même passées expertes dans les solutions de pilotage du cycle de vie des déchets. Située dans le Nord-Pas-de-Calais, l’entreprise Baudelet agit de manière ciblée sur le département et sa région, et promeut la valorisation locale. Créée en 1920 par Mme Baudelet, elle est encore aujourd’hui une entreprise familiale. Valorisation de déchets, traitement et récupération des ferrailles et matériaux, traitement des terres polluées : Baudelet environnement propose des solutions aux entreprises, aux collectivités et aux particuliers. Sur le terrain, sa capacité de production électrique atteint 3MW/h grâce aux quelques 500 000 tonnes de déchets traitées par an, valorisés dans une vingtaine de filières.

Historiquement spécialisé en mécanique de très haute précision, le groupe CNIM se distingue pour sa part grâce à la réalisation d’usines de traitement des déchets clés en main. De la conception à la maintenance, CNIM a réalisé plus de 200 lignes de traitement des déchets (ménagers et industriels) et 160 usines dans le monde pour une capacité annuelle de 24 millions de tonnes. La technologie d’épuration des fumées LAB, conjuguée aux grilles de combustion, fours et chaudières, permet d’éliminer les polluants présents dans les gaz de combustion. Le groupe CNIM valorise les déchets de villes comme Bordeaux, Lyon ou Marseille, mais également Bakou, Londres, Bruxelles ou encore Monaco.

Egalement dans le paysage français depuis 1995, Paprec a débuté dans le recyclage du papier, avec 45 employés. 18 ans plus tard, elle compte 3 500 collaborateurs et enregistre un CA de 750 millions d’euros. Leader du recyclage (papiers, déchets verts, DIB, DID, déchets de chantier, piles…), Paprec traite désormais 5 millions de tonnes de déchets par an et propose des services connexes comme des plateformes de compostage.

Le prix de l’inaction

Bien que la filière industrielle de valorisation des déchets soit parfaitement structurée, les conséquences d’une certaine inaction ne relèvent pas de la science-fiction, elles sont d’ores et déjà visibles. Les récentes polémiques sur les immenses décharges à ciel ouvert à Naples (où a fait rage la fameuse “crise des ordures” aux implications mafieuses gravissimes pour l’économie de la ville), ou même dans le sud de la France, ont attiré l’attention publique sur ce problème, situé au coeur du territoire européen.

A l’échelle mondiale, plus personne n’ignore l’existence du tristement fameux “continent de plastique” qui se situe entre Hawaï et la Californie. Ce vaste territoire six fois plus grand que la France a été constitué, au gré des courants, par des millions de tonnes de déchets plastiques jetés dans les océans. En Chine, c’est Hong-Kong qui risque de finir ensevelie sous ses propres déchets pour ne pas avoir instauré plus tôt de politique de traitement autre que celle de l’accumulation des déchets dans ses décharges. La mégapole a d’ailleurs entamé un programme de réduction des déchets solides (40% d’ici 10 ans) et a démarré la valorisation des déchets alimentaires.

Le sol, l’air, les océans sont envahis et pollués par des déchets à ne plus savoir qu’en faire. Dans une perspective déjà encombrée, la valorisation apparaît comme une solution pragmatique, au moins à moyen terme. Il existe un ensemble de solutions concrètes pour utiliser les déchets et les transformer finalement en matière noble (et utile !). Il semblerait qu’avec la bonne technologie, il y ait bien de l’or dans nos poubelles !

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12 Comments

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  • Antoine , 23 janvier 2014 @ 8 h 43 min

    Voilà des solutions concrètes et simples qui permettent de faire avancée les choses. Il est parfaitement possible de prendre une autre voie que celle de la taxation à tout va représentée par EELV. Une question que vous avez peut être traité implicitement. Est ce que la rentabilité économique est compatible avec l’effort écologique ?

  • prout , 23 janvier 2014 @ 9 h 22 min

    770 millions de tonnes !!!!??

    pour 65 millions d’habitants?

    n’y aurait-il pas quelques zéros qui trainent ?

  • dn , 23 janvier 2014 @ 11 h 26 min

    Résumons : il y a 20 ans, personne ne recyclait (ce qui était irresponsable) et pourtant nos taxes foncières étaient 5 fois inférieures à celles de maintenant. On a créé une taxe spéciale ordures ménagères qui s’ajoute à la TF, et contraint les contribuables à faire eux-mêmes un boulot qu’ils payent déjà deux fois.
    Comme si cela ne suffisait pas, on se fait réprimander si le tri est incorrect (refus de collecte), on ne ramasse plus le verre par souci d’économie de carburant (pas pour le citoyen!), et des gamins de 25 ans nous expliquent à la déchetterie que le carton et le papier sont à mettre dans des containers différents, débarrassés préalablement de leurs adhésifs et souillures…à quand le grattage de l’encre ?? Sans parler de la tête de carême lorsqu’on arrive 1/4h avant la fermeture ou qu’on met 3 miettes à côté du container…

    Chaque année, le tract du syndicat de recyclage intercommunal nous donne un cours de chimie sur les différents plastiques (PE, PER, PET, polystyrène, emballages, sur-emballages, cartons lisses, gaufrés, plastifiés, pelliculés); la cellulose, le verre, les rejets de GES…etc pour nous culpabiliser.

    Lorsque j’achète un yaourt, je paie le contenu et le contenant. Lorsque j’achète une télévision, je paie une taxe de recyclage à la source. Aujourd’hui, nous payons des taxes exponentielles pour faire le boulot à la place de fonctionnaires qui nous engueulent, et l’Etat nous oblige à lui redonner gratuitement des emballages ou matériaux déjà payés et taxés pour les revendre à son profit..

    Lorsque l’Arnaque se cache sous le faux-nez de l’éco-citoyenneté…

  • monhugo , 23 janvier 2014 @ 13 h 31 min

    Pour les romanichels qui se précipitent comme les nuisibles qu’ils sont sur nos poubelles, dès que sorties la veille pour la collecte au petit jour par les éboueurs, il est clair qu’il doit y avoir des “trésors” dedans !
    Ces immondices sur pattes fouillent, ne trouvent rien – banlieue sans ressemblance avec Neuilly-sur-Seine – et salopent le trottoir en dispersant les sacs éventrés.
    Quand on leur fait remarquer que seul le jour des “encombrants” pourrait être (très éventuellement) fructueux, ces “braves” gens, qui n’entendent (paraît-il) pas la langue du pays qu’ils squattent continuent au mieux leurs explorations à la même allure, voire les accentuent, histoire de vous narguer !

  • Candide , 23 janvier 2014 @ 13 h 38 min

    Triez, séparez le papier du reste de votre poubelle normale, jetez le verre dans les conteners… petits gestes du quotidien qui permettent de préserver la nature et de dynamiser notre économie.

  • baldag , 23 janvier 2014 @ 14 h 08 min

    Tout ce qui pourra être récupéré pour être recyclé ou transformé ne sera pas prélevé sur cette Terre. A condition que la production qui en découle ne soit pas plus polluante que la matière récupérée.
    Mais il faut savoir que plus on recycle une matière, moins elle est de qualité et plus on y ajoute des adjuvants : exemple, injection de paraffine pour recycler le carton ce qui fait qu’au bout de 2 ou 3 recyclages, le carton est saturé et de basse qualité.

  • Candide , 23 janvier 2014 @ 14 h 50 min

    De la parafine ? Pour quelles raisons ?
    Les fibres de cellulose constituant le papier et le carton peuvent être réutilisées jusqu´à 7 fois, apès quoi elles sont trop abimées. Pour compenser les papetiers réinjectent de la pâte à papier vierge, plus coûteuse, mais de bien meilleure qualité puisque les fibres sont alors “neuves”.

    Ceci fait du papier un matériau recyclable à 100%. Les ennuis proviennent effectivement des colles, encres, vernis ajoutés lors de leur transformation. Sans parler des complexes (briques Tetra-Pak par exemple), très difficiles à recycler aujourd´hui.

    Ce que je ne comprends pas c´est qu´on doive payer pour se faire enlever nos poubelles de papier, alors que ce matériau est largement valorisé (je dirais entre 500 & 1000€ la tonne, suivant la qualité du papier).
    La Chine aujourd´hui accapare la plupart des flux de papier recyclé… les prix montent !

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