La fragile cohabitation du Liban mise à mal

par Manuel Lahut*

« Après nous, le déluge ». Cette expression que l’on attribue à Madame de Pompadour à son amant Louis XV lors de la défaite, le 5 novembre 1757 à Rossbach, des troupes franco-autrichiennes face à l’armée prussienne du Roi Frédéric II, résume assez bien l’état d’esprit actuel du régime syrien actuellement empêtré dans une guerre civile qui n’en finit pas.

Les combats entre sunnites et Alaouites qui ont déjà fait près d’une quinzaine de morts depuis lundi à Tripoli et au lendemain de l’attentat survenu dans le quartier chrétien d’Achrafieh, au nord de Beyrouth font craindre une résurgence de la guerre civile libanaise (1975-1990).

Cette fois, la violence a visé le cœur d’un quartier chrétien de Beyrouth, l’homme qui, depuis 2005, a osé tenir tête à Bachar El Assad en enquêtant sur l’attentat contre le premier ministre Rafic Hariri et sur l’assassinat du journaliste Samir Kassir.

La volonté d’entraîner le Liban dans le chaos confessionnel pour mieux le contrôler paraît évidente après les menaces répétées du régime syrien d’exporter le conflit à défaut d’avoir pu conserver sa tutelle sur le pays après la guerre civile. C’est surtout le retrait des forces syriennes au lendemain de l’attentat contre Rafic Hariri, sous la pression de la communauté internationale qui a été vécue comme une humiliation pour Damas.

Pour Bachar El Assad, peu importe si il faut recourir lâchement à la violence de manière aveugle. Ce qui compte, c’est d’essayer d’affirmer ce qui lui reste d’autorité, au mépris de la fragile cohabitation qui règne encore dans le pays.

Jusque là cantonnée au Nord, à Tripoli, entre pro et anti-Assad, la contagion de la crise syrienne gagne progressivement du terrain. Elle atteint désormais un quartier chrétien de Beyrouth. Le message est clair. Il s’agit d’effrayer les chrétiens et d’instrumentaliser la question des minorités.

Les obsèques du chef de la sécurité libanaise Wissam Al Hassan ont donné l’occasion aux partisans de Saad Hariri de manifester leur mécontentement contre le Premier ministre, Najib Mikati, accusé par ses opposants de couvrir ce « crime ».

Les partisans de Saad Hariri qui remettent en cause la légitimité du gouvernement contrôlé par le Hezbollah, pourraient bien se poursuivre malgré l’appel au calme de leur leader.

*Manuel Lahut a été journaliste à France Soir. Il est spécialiste de l’Amérique latine, du Liban et du Vatican.

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2 Comments

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  • Goupille , 24 octobre 2012 @ 16 h 27 min

    Société multiculturelle, disent les idiots utiles…
    Balkans, Moyen-Orient, encore une preuve du paradis qui nous attendrait si nous nous laissions faire.

    Preuve aussi que ces peuples ne peuvent vivre en paix que sous dictature ou protectorat étranger, français de préférence. Tant que le Liban a conservé les modes de fonctionnement que la France lui avait imposés : la paix civile, la cohabitation et la prospérité…
    Depiis : le chaos, la terreur, les massacres.

  • BUREAU , 26 octobre 2012 @ 17 h 36 min

    Bonjour,
    Justement, ces pauvres libanais ne veulent pas tomber sous le joug des islamistes, comme la syrie.
    Cordialement

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