La presse française est libre de ne pas tout dire…

par Emmanuel d’Estouteville

Le journalisme est « un métier où l’on passe une moitié de sa vie à parler de ce que l’on ne connaît pas et l’autre moitié à taire ce que l’on sait ». Cette citation d’Henri Béraud, une majorité de journalistes l’ont sûrement à l’esprit quand ils prennent le parti de passer sous silence des faits que la déclaration des droits et des devoirs des journalistes édictée à Munich en 1971 leur commandent de respecter.

Cette déclaration énonce clairement en son article 1 : « Respecter la vérité et le droit que le public a de la connaître constitue le devoir primordial du journaliste ». Les bases du journalisme ne sont apparemment pas acquises par un certain nombre de nos confrères qui choisissent délibérément d’occulter régulièrement des informations sûrement considérées comme secondaires.

Cette absence de pluralité de l’information a des répercutions évidentes sur les esprits peu informés auxquels nos médias de masse s’adressent. C’est pourtant par ce biais qu’une majorité de nos concitoyens sont informés. Le plus surprenant, c’est qu’ils manifestent aussi peu leur mécontentement face à ce flux ininterrompu d’informations « politiquement correctes » financées à grand renfort de subventions par leurs impôts.

Nos médias ont beau s’en défendre constamment, la réalité leur donne tort. Les exemples en la matière sont si nombreux qu’il est difficile de les lister de manière exhaustive. Il est encore plus difficile d’en sélectionner quelques-uns au risque d’être taxé de populiste.

Cette dictature de la pensée unique conduite par un certain nombre de nos médias n’est pas sans conséquences puisqu’elle soustrait du débat, des sujets qui mériteraient d’être portés à la connaissance du public. Agir de la sorte induit l’idée qu’ils sont trop bêtes pour se faire une idée claire sur un sujet précis sans risquer ensuite de révéler leurs plus bas instincts.

Quand certaines informations sont trop polémiques pour être reprises dans les grands médias, c’est la qualité du débat démocratique qui est en cause. À défaut de toutes les relayer, les faiseurs d’opinions ne doivent alors pas s’étonner de voir progressivement leur public se détourner d’eux.

Peu leur importe puisque les subventions sont là. Le scandale et l’injustice résident dans la répartition de ces fonds : 50% du montant total des subventions à la presse bénéficient à 2% des titres aidés. Le Parisien a reçu 16,8 millions d’euros en 2010, Le Monde : 17 millions d’euros, Libération : 14 millions et Le Figaro : 13,2 millions d’euros*.

Alors évidemment, tant que les médias continueront d’obtenir aussi facilement leurs subventions, (272,8 millions d’euros d’aides directes à la presse en 2012)*, leur secteur en crise n’aura aucun intérêt à se réformer en profondeur et à changer les mauvaises habitudes, ainsi que les discours partisans parfois empreints d’arrogance.

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15 Comments

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  • o.icaros , 24 novembre 2012 @ 9 h 53 min

    Cela fait plus de 30 ans que nous savons tous que nous vivons au-dessus de nos moyens. Un des premiers à nous avoir alertés était François de Closets, journaliste de son état. Les journalistes n’ont aucune responsabilité dans l’ignorance des Français en ce qui concerne ce point. La responsabilité de la dette incombe aux politiques qui, pour se faire élire, ou réélire, n’ont pas eu le courage de faire les réformes qu’ils fallait faire. La faute incombe aussi aux Français qui descendaient dans la rue dès qu’on voulait toucher à leurs “acquis sociaux”.

    En revanche, oui, les journalistes manipulent l’opinion publique. Non pas en mentant, cela est impossible, mais en taisant une information ou une partie de l’information.

    Un exemple: dans les années 80 lorsque Pasqua avait renvoyé au Mali 101 Maliens, cela avait soulevé l’indignation en France: renvoyer de braves gens, c’est indigne du pays des droits de l’homme; pourquoi 101? et le choix du charter.

    Ah oui, le choix du charter avait fait couler beaucoup d’encre.

    Ce que les journalistes n’avaient pas dit à l’époque, ils l’ont tu volontairement car s’ils l’avaient dit cela aurait dépassionné le débat, c’est qu’il n’y avait qu’un vol par semaine pour Bamako. A raison de deux expulsions par semaine il aurait fallut deux ans pour expulser les 101 Maliens. Dit comme ça, l”information prend un autre sens et justifie l’emploi du charter et ce d’autant plus que pour la tranquillité des voyageurs on ne peut embarquer des gens qui crient et hurlent (comme si on les égorgeait) pendant tout un voyage (4-5 heures?).

    C’est comme pour le “croc de boucher” que tout un chacun s’est cru autorisé, dans sa conversation pour montrer qu’il était un sachant, d’user abondamment.

    Or ce “croc de boucher” ne repose que sur les paroles de FOG, connu pour être une mauvaise langue et un petit rapporteur.

    C’est FOG qui, dans son livre sur Chirac, prête ces paroles à Sarkozy. La citation était entre guillemets. Elle est devenue une déclaration avérée. Ce serait Chirac qui lui aurait fait cette confidence à FOG.

    Est-elle vrai? Est-elle fausse? Sachant que FOG répète tout, Chirac aurait-il prêté ces paroles à Sarkozy avec l’espoir qu’elles seraient répétées par FOG et fouteraient la merde en nuisant à Sarkozy?

    Le problème c’est que tout le monde ment, même ceux qui dénoncent les menteries des autres. Comme dans un auberge espagnole, où chacun apporte son repas, chacun interprète les choses avec ce qu’il a en lui. C’est son interprétation mais cela n’est pas forcément la vérité. Je ne suis pas à l’abri des critiques car moi aussi j’interprète avec ce que je sais et ce que je ne sais pas.

  • Frédérique , 24 novembre 2012 @ 11 h 34 min

    Parce qu’un journaliste a dit une fois ou deux, que la France vivait au dessus de ses moyens, le bon peuple d’en bas les yeux rivés sur leurs écrans ont tout de suit compris que la dette du pays avait déjà explosé le budget de l’annèe, mais ils ont préféré faire comme si de rien n’était. C’est d’une évidence! Surtout quand les opposants au gouvernement (gauche, syndicats), eux, passent plus de 2 fois par semaine dans les émissions pour rabâcher que l’argent, il y en a, qu’il n’y a qu’à le prendre aux riches.
    Nous ne sommes pas tous des intellectuels, mais si l’information avait circulé avec la régularité d’un “amour, gloire et beauté” pour expliquer les tenants et les aboutissants d’une telle politique, je suis prête à parier que bon nombre d’entre nous s’en serait inquiètè, et ça n’a pas été le cas. Alors quoi de plus naturel, lorsqu’on a élu des représentants pour s’occuper de la gestion des comptes du pays que de leur faire confiance, surtout, lorsque comme des millions d’autres, on ne posséde pas de diplôme en économie et quoi de plus normal que de penser que les journalistes sont là pour nous informer, et pas seulement de ce qu’ils jugent bon pour nous.
    Quant aux gouvernements qui reculaient devant des manifestations d’éternels révoltés (même lorsqu’ils arrivaient à en mobiliser 1 million les grands jours de gloire, ils y en avaient 64 millions qui restaient chez eux), laissez moi rire, ça devait bien arranger leurs affaires de ne pas faire respecter la loi, et de montrer que l’état écoutait le peuple, alors que ce dernier n’en aurait rien eu à foutre, si là encore, les journalistes n’envenimaient pas l’affaire en la passant en boucle dans tous les journaux.
    C’est un peu simpliste de faire retomber sur le peuple, l’état actuel du pays, lorsqu’on sait que c’est bien le seul à n’avoir jamais la possibilité de prendre une décision (combien de référendums ces 20 dernières années? et combien de respectés), combien de chances de pouvoir changer le paysage politique sans les proportionnelles?
    Vous reconnaissez que tout le monde ment, alors comment pouvez vous dire que le peuple savait?

  • Gérard , 24 novembre 2012 @ 12 h 31 min

    François de Clauset affirmait aussi que le Concorde n’avait jamais été espionné par les russes et que la ressemblance du Concorde avec le Tupolev était dù à l’évolution normale de la technique ….

    Dans le même temps, Turcat, pilote d’essai du Concorde, racontait comment Kroutchev, visitant les ateliers du Concorde, avait sorti son métre-ruban de sa poche pour mesurer la porte d’entrée en disant : “Tiens ! vous l’avez agrandie ?”

    Passons aussi sur cette journaliste qui déclarait que les voitures consomment 45% plus d’essence quand on allume le chauffage …

    Si, pour la Politique … et le reste … c’est du même tabac … alors on peut dire que nous sommes effrectivement bien informés !

  • Michou , 24 novembre 2012 @ 12 h 32 min

    Ce gros-titre prête à rire : Je pense qu’il faut plutôt lire:
    ” La presse française n’est pas libre de tout dire ”
    Ainsi, chacun comprendra mieux !…..

  • TIARD Martine , 24 novembre 2012 @ 21 h 30 min

    Intéressant cet article. Je cherche depuis des mois à obtenir des réponses de certains journalistes sur des sujets épineux. Silence radio, silence papier, silence télé. Le plus dramatique c’est que nous sommes les dindons de la farce. Les journalistes sont une arme redoutable ; ce n’est pas pour rien qu’on appelle la presse, le 4e pouvoir. Si l’on ne connait rien, comment réagir, comment discuter, comment comprendre….. Avant Internet, nous étions pieds et poings liés devant les journalistes et eux seuls pouvaient nous instruire et nous expliquer. Curieusement, à l’époque, ils faisaient pour la plupart très bien leur travail. Par contre aujourd’hui, les journalistes sont des porte paroles du pouvoir et ne disent que ce qu’on leur dit de dire. Alors heureusement, Internet est là pour que chacun puisse rechercher les infos dont il a besoin bien que ce soit long et difficile. D’autant plus difficile que nous trouvons l’information toute crue et personne pour la commenter, lui donner des bases, la replacer correctement dans le contexte adéquat. D’où des déviances qui peuvent être dangereuses. Je ressens tout ça actuellement et ça me met en colère de voir que le travail de journaliste, qui est si important, est complètement dénaturé. Tous les jours, je cherche des infos sur l’islam, son histoire, sa montée, etc… Je suis confrontée à des tas d’infos plus ou moins rudes et plus j’avance dans mes recherches, plus je constate la désinformation dont nous avons fait l’objet depuis des années, les mensonges qui nous ont été distillés par les médias pour nous aveugler pendant notre envahissement….. Et le plus désespérant, c’est que tout ce que j’apprends ne me servira à rien car je ne peux pas le partager, ni l’utiliser pour agir utilement…. Alors effectivement, les journalistes pour moi sont devenus comme les fonctionnaires, les avocats et les hommes politiques, des parasites qui nous enfument et nous mentent et nous maintiennent dans la méconnaissance.

  • Gérard , 24 novembre 2012 @ 21 h 59 min

    Martine ! Si vous comptez sur les journalistes pour vous informer, vous risquez de n’avoir qu’un son de cloche !
    Et puis … Il n’y a pas qu’Internet !
    S’agissant de l’Islam, vous pouvez aussi vous procurer quelques livres.
    A titre d’exemple :
    “Insoumise” de Ayaan Hitsi Ali (Député néérlandaise d’origine somalienne)
    “Confidences à Allah” de Saphia Azzzeddine (d’origine marocaine)
    “La Maladie de l’Islam” de Abdelwahb Meddeb (Professeur à Paris X d’origine tunisienne))
    Tous ces auteurs sont musulmans …
    Sur les origines historiques ça ne manque pas non plus … à commencer peut-être par les ouvrages “… pour les nuls ” (FIRST éditions)

  • Robert , 24 novembre 2012 @ 22 h 11 min

    “La presse française est libre” c’est un propos d’imbécile heureux, comme de dire “j’ai confiance dans la justice de mon pays.”

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