La France : une Nation qui se respecte ?

Certains se plaisent à dire que le clivage entre la droite et la gauche n’a plus lieu d’être. Pourtant, la fracture entre ceux qui s’affirment de droite et ceux qui se revendiquent de gauche est nette. Elle se situe avant tout dans le choix des valeurs. Par exemple, la nationalité est pour la droite beaucoup plus qu’une situation juridique prouvée par un titre et qui attribue des droits, c’est une qualité, et même une dignité qui se mérite et qui doit susciter une fierté d’appartenance. D’un côté, on est dans le juridisme froid, de l’autre, dans le patriotisme chaleureux. Le débat sur la déchéance de la nationalité est de ce point de vue très révélateur. Il souligne point par point l’opposition frontale entre les deux approches.

A gauche, on voit la République comme un espace qui donne des droits à tous ceux qui y pénètrent. Naître dans cet espace garantit en outre l’acquisition automatique de la nationalité pour peu qu’on y soit à sa majorité depuis l’âge de 11 ans et le droit de « réclamer » sa nationalité à partir de 16 ans pourvu qu’on y ait séjourné de manière continue ou discontinue depuis cinq ans. C’est le « droit du sol » présenté comme un droit républicain par opposition au droit dit du « sang » dont le nom même révulse la pruderie idéologique tant il évoque chez des esprits simplistes l’idée odieuse de la race. Pas de chance pour eux : le premier droit de la nationalité qui date du Consulat repose sur le droit du sang. Il attribue la nationalité en fonction de celle des parents. Le sang en question, c’est celui de la filiation, adoption comprise, quelque soit la couleur. Le droit du sol, au contraire régnait, ça va sans dire, et d’ailleurs on ne l’appelait pas ainsi, lorsque ceux qui naissaient sur le territoire du roi étaient ses sujets, dits « régnicoles ». La République n’a fait sien ce droit monarchique du détenteur du sol de s’approprier ceux qui y naissent que lorsqu’elle a manqué de soldats pour faire la guerre à l’Allemagne et reconquérir l’Alsace-Lorraine. Les premiers républicains, la gauche de l’époque révolutionnaire, pensaient au contraire des socialistes d’aujourd’hui, que l’égalité entre les citoyens reposait sur la transmission de la noblesse d’être Français, de père en fils, et qu’il y avait une différence entre le national et l’étranger.

Bien sûr, en plus du droit du sang, il y a aussi celui de la volonté qui permet à un étranger de devenir Français. Mais là encore les approches sont opposées. Est-ce que l’acquisition doit être facile, ou est-ce qu’elle doit être exigeante? Une députée socialiste avait, lors d’une réunion de travail, déclaré qu’imposer à un candidat une demande écrite était pour lui une souffrance. On a beau être soi-même descendant d’immigré, mon sang n’a fait qu’un tour. Entre le Belge né à Menin en 1831, et moi, il y a eu un grand-père mort en 1916, un père retenu cinq ans en Allemagne, un Frère aîné en Algérie. J’ai eu à remplir mes obligations militaires sans considérer que c’était un supplice. Bref, j’ai pensé tout haut que de telles formules évoquaient le « parti de l’étranger », stigmatisé par le général de Gaulle. Ma collègue de l’époque s’est sentie offensée, mais la XVIIe Chambre l’a heureusement déboutée. Elle avait eu recours au droit pour défendre sa personne. Moi, je pensais que c’étaient ses propos qui avaient offensé ma Nation qui vaut bien des efforts pour avoir l’honneur d’en être membre.

La carte d’identité doit-elle être comme celle d’une association, un simple ticket d’entrée, d’ailleurs de moins en moins nécessaire, puisque les resquilleurs ont eux aussi des avantages qu’on pensait réservés aux membres ? On peut en avoir plusieurs soulignent les politiciens de gauche qui vont jusqu’à considérer qu’un détenteur de plusieurs nationalités peut être parlementaire ou ministre. Au contraire, pour qui accorde de la valeur à la nationalité, l’idée qu’on puisse participer à la défense des intérêts d’un pays, à la recherche de son Bien Commun, à l’élaboration de ses lois, tout en appartenant à une autre communauté nationale avec laquelle il peut y avoir un conflit d’intérêt, est une aberration. La double-nationalité devrait être extrêmement limitée et par exemple ne pas accorder un double droit de vote. « Point de vue étriqué » pour qui est prêt à accorder le droit de vote aux étrangers, avouant par là que la nation, la nationalité, la citoyenneté ne veulent plus rien dire sauf bien sûr lorsque « citoyen » désigne un protestataire de gauche qui manifeste, fût-il étranger.

Cet affrontement entre deux conceptions rebondit avec la déchéance de la nationalité. Elle ne doit frapper que des détenteurs de plusieurs nationalités, car le Droit ne tolère pas qu’on « fabrique » des apatrides. Mais peut-on, comme l’avait promis le Président Hollande, la retirer à des Français bi-nationaux nés en France ? La gauche s’émeut à cette idée pour trois raisons. D’abord, elle brandit par réflexe le droit du sol, qui est un contre-sens. Ensuite, elle pense à ceux de ses électeurs qui se sentiront peut-être visés par cette mesure. Enfin, elle argumente : le risque de la déchéance n’arrêtera aucun terroriste. Sans doute, mais raisonner en se mettant à leur place est un aveu scandaleux. La déchéance n’a pas à être efficace. C’est une mesure de portée symbolique qu’on apprécie si on accorde une valeur à l’appartenance nationale. La déchéance n’est pas faite pour les déchus, qui méritent bien autre chose. Elle est faite pour rappeler qu’un traître ou un renégat n’ont pas leur place dans une nation qui se respecte. Le retrait de la proposition présidentielle montre que la question est là : faut-il encore qu’elle se respecte !?!

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26 Comments

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  • 0 / 10
  • penelope , 24 décembre 2015 @ 11 h 28 min

    je suis un peu comme cette personne qui dit que le FN ne vaut pas mieux que les autres,donc “tous pourris”,cependant je pense tout de même que nous n’avons jamais donné la possibilité au FN de montrer ce dont il est capable où pas,et dans ce cas,je me refuse à le diaboliser comme tous le font;je me méfie un peu des extrêmes,mais reconnais que certaines de leur parole sur la France me plaisent assez,les autres parlent beaucoup de mondialisation,de vivre ensemble mais tout cela sonne faux dans leur bouche;je ne me sens plus dans le pays que j’ai toujours connu,ce n’est surtout pas une nostalgie du à mon ‘âge certes avancé;je ne reconnais pas la “mère Patrie” que l’on me disait devoir aimer.

  • Marino , 24 décembre 2015 @ 14 h 43 min

    Séquences cultes de Jean Marie Le Pen !

    https://www.youtube.com/watch?v=q54PyQrycUs

  • petitjean , 24 décembre 2015 @ 19 h 23 min

    Joyeux Noël à tous !

    un beau texte que je partage :

    “A-t-on encore le droit de souhaiter un joyeux Noël à ses amis ? Rien n’est moins sûr car, qu’on le veuille ou non, Noël ce n’est pas seulement cette fête laïque qui permet à tous de se goinfrer en famille en oubliant tous les malheurs du monde et tous les malheureux du coin de la rue. Noël, c’est aussi et surtout le souvenir de la naissance, il y a deux millénaires, dans une crèche perdue au fin fond de Proche-Orient, d’un « fils de Dieu » qui apporta au monde le plus étonnant des messages : « Aimez-vous les uns les autres ».

    Et pendant plus de vingt siècles, au milieu des tueries les plus effroyables, des carnages épouvantables, des famines, des épidémies, de tous les égoïsmes, de toutes les dictatures, dans un océan de misère et des flots de sang, des millions et des millions de braves gens eurent « la naïveté » de croire en ces paroles dont ils firent leur espoir. Autant dire qu’à part le sapin, le foi gras, les truffes, le champagne et les cadeaux, Noël n’a rien de très… laïc.

    Mais dans un pays socialiste comme le notre, il faut croire au Père Noël, c’est-à-dire aux promesses électorales des camarades du Parti, et il est formellement interdit de croire en Dieu, de s’imaginer qu’un petit enfant, né dans la paille, il y a très longtemps, a transmis aux hommes un message d’amour qui a tout de même changé la face du monde et qu’on pourrait d’ailleurs curieusement résumer par ces mots hélas galvaudés : liberté, égalité, fraternité.

    D’après les statistiques, plus personne, à part quelques rombières et une poignée de puceaux boutonneux, ne croirait en Dieu. Et d’après nos dirigeants (de gauche comme de droite) la France, jadis « fille ainée de l’Eglise », n’aurait, pas plus que notre vieille civilisation occidentale, jamais rien retenu du message du nouveau-né de Bethléem. Peut-être…

    Toujours est-il que, même si l’on ne croit plus en Dieu et si « l’infâme » a été écrasé comme le souhaitaient Voltaire et ses copains francs-maçons des Lumières, nous avons tous besoin, au moins une fois par an, de croire que le monde pourrait devenir meilleur, même avant un au-delà bien incertain.

    Et nous avons aussi besoin de souhaiter un joyeux Noël fraternel et complice à nos amis, notamment à ceux de ce modeste blog qui, au fil des années, ressemble de plus en plus à une sorte de… secte un brin iconoclaste.”

    De Thierry DESJARDINS sur son blog

    http://www.thierry-desjardins.fr/2015/12/joyeux-noel-a-tous-2/

  • Psyché , 25 décembre 2015 @ 20 h 15 min

    Etat d’urgence prolongé, flicage d’internet, privation des libertés, dictature socialiste : l’heure est venue d’en finir avec l’extrême-gauche

    http://breizatao.com/2015/12/23/vaincue-defaitiste-et-isolee-lheure-est-venue-den-finir-avec-lextreme-gauche-editorial/

  • Psyché , 25 décembre 2015 @ 20 h 20 min

    Note de renseignement sur le réseau d’extrême-gauche soutenant activement l’immigration massive,

    http://breizatao.com/2015/12/22/note-de-renseignement-sur-le-reseau-rennais-de-soutien-a-limmigration-clandestine/

    on y voit que la mouvance mondialo-trotskyste puise le principal de ses bataillons parmi les membres du secteur subventionné …

  • Cap2006 , 25 décembre 2015 @ 21 h 50 min

    @troy, je suis bien d’accord avec vous sur la stupidité de parler de droite et de gauche aujourdhui.

    Par contre, j’ai du mal à vous suivre sur ce qu’il y aurait de “patriote” à souhaiter s’enfermer dans un entre soi stérile, à projeter un avenir fondé sur un passé totalement idéalisé, et croire que le reste du monde nous oublierait …

    La nation est aussi une force immatérielle, non territoriale, une sorte de grandeur d’âme, d’énergie collective, qui s’intègrent parfaitement dans une construction collective avec les peuples voisins…
    Qu’il y a t il en commun entre un breton, un picard, un basque ou un tourangeau? Rien de moins conciliable qu’avec un flamand, un Bavarois, un piémontais, étc…
    La différence tient dans un camp guidé par la peur et le manque de confiance en ses valeurs, face à un camp guidé par l’enthousiasme et l’assurance de la force de ses valeurs.

  • acacia , 26 décembre 2015 @ 1 h 12 min

    D’accord avec vous sur votre analyse mais le problème est de savoir comment l’on qualifie l’étiquette du FN qui a un programme similaire à celui de Mélenchon et plus de 65% d’électeurs de gauche dans ses rangs .

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