Cette sécurité sociale que le monde nous envie

La situation économique en France est décidément de plus en plus tendue. Et pendant que le petit Pépère du peuple achève son périple dans les eaux agitées du Pacifique, que son gouvernement, de maladresses en approximations, se fait pilonner par une majorité outrée, tout semble aller au pire et le moral des Français dégringole. Allons. Franchement. Ressaisissons-nous ! Il y a pourtant au moins une bonne raison de nous réjouir : notre système de sécurité sociale que le monde entier nous envie, évidemment !

Et notre système actuel de sécurité sociale, c’est vraiment tout un poème.

Longtemps, ce système d’assurance collectiviste a été habilement confondu avec le système de soins français, longtemps parmi les meilleurs du monde mais qui, après des années d’errements et de budgétisations hasardeuses, n’est plus que l’ombre de lui-même : urgences désorganisées, déficits réguliers comblés à la petite semaine par des expédients, médecins démotivés corvéables à merci et devenus de véritables fonctionnaires d’un système orwellien, patients devenus la dernière roue d’un carrosse qu’on peine à sortir de l’ornière, tout est rassemblé pour que l’assurance santé française se transforme en une délicieuse aventure pleine de rebondissements.

Des rebondissements, il y en a, régulièrement, à tel point que ces colonnes n’ont aucun mal à en trouver pour alimenter la chronique. Et sans ça, on ne saurait vraiment pas quoi trouver à reprocher à ce système que le monde nous envie donc tant.

Ainsi, sans ce génial système de sécurité sociale collectivisé à outrance, qui serait-là pour ruiner des parents ? Par exemple, quel système, sinon un organisme collectiviste tentaculaire, mal géré et kafkaïen en essence, prétendrait s’occuper de tout le monde et assurer chacun contre les accidents de la vie tout en laissant sur le bas côté, avec une décontraction assez inouïe, un nourrisson atteint d’une maladie de longue durée ? Histoire rocambolesque dans laquelle le même nourrisson, eut-il été soigné à Paris, aurait été entièrement couvert mais traité à Nantes, parmi les gueux provinciaux, se voit adressé une facture de 9000 euros.

Ainsi, sans ce superbe système collectiviste où tout le monde cotise à fonds perdus pour une caste de privilégiés toujours moins nombreuse, qui finirait en retraite avec 1.07 euros par mois ? Quel système de retraite, sinon celui que le monde nous envie, pourrait ainsi se permettre de ponctionner chaque cotisant de centaines d’euros tous les mois pour ne leur donner qu’un euro en retour, une fois la retraite arrivée ? Heureusement, le plus scandaleux des organismes de sécurité sociale, le Régime Social des Indépendants, le RSI, relève très facilement le défi.

Ainsi, sans ce magnifique système collectiviste qui prétend à l’égalité de traitement, qui pourrait se permettre des traitements très différents entre les salariés, les commerçants et les professions libérales ? Qui pourrait d’un côté nous tympaniser d’une solidarité étendue, effective et chevillée au corps de ces organismes et de l’autre écrabouiller certains de ponctions de plus en plus iniques, pour des services en retour toujours plus mauvais voire inexistants, au point de les pousser au suicide ?

Ainsi, sans ce formidable système collectiviste qui en est réduit à fliquer les entreprises pour éviter leur fuite désespérée d’une ponction toujours plus grande, qui aurait l’idée d’introduire des cartes professionnelles toujours plus farfelues (maintenant, c’est le bâtiment !) pour bien compter le cheptel ? Si l’URSSAF n’était pas là, qui s’occuperait de faire grossir les coûts de main-d’oeuvre dans des proportions invraisemblables ? Et s’il n’était pas là, combien d’entreprises, soudainement capables de payer une main-d’oeuvre pour un travail donné, soudainement plus encombrées de paperasseries idiotes, de formulaires débiles et de petites cartes professionnelles plastifiées à faire renouveler régulièrement, pourraient alors embaucher et inverser (enfin) la courbe du chômage ?

Et ainsi, surtout, sans notre magnifique système de sécurité sociale que le monde nous envie, comment Frédéric Lefebvre ferait parler de lui ?

Il faut dire qu’il a un boulevard devant lui avec un tel sujet, et que les primaires des Républicains s’annoncent bientôt. Autant trouver un bon angle d’attaque, et tant qu’à faire une récupération politique évidente, au moins, la proposition qu’il fait n’est pas l’énième nuage de fumée qui consiste à se proposer ingénument comme médiateur en promettant d’améliorer le système.

En effet, prenant fait et cause contre le Régime Social des Indépendants, le politicien semble vouloir remettre en question l’affiliation automatique à ce régime pour les indépendants et, plus iconoclaste dans un pays où la solidarité n’est pas autre chose qu’obligatoire, totale et sans retour arrière possible, il veut leur permettre de choisir librement leur régime de protection sociale. Dans une pétition adressée au gouvernement, le voilà qui écrit hardiment :

« Pour faire face aux problèmes récurrents des petites entreprises face au RSI , soutenez qu’elles bénéficient pour l’avenir de la liberté d’affiliation au régime de leur choix »

Oh. Voilà qui décoiffe quelque peu de la part de l’auteur d’un Zadig et Voltaire devenu culte : demander ainsi que les indépendants et les commerçant puissent librement choisir leur affiliation, c’est osé. Et s’il propose cette liberté en donnant l’exemple d’indépendants qui pourraient alors choisir de s’inscrire à la sécurité sociale des salariés, il évoque aussi la possibilité pour eux de choisir une assurance étrangère.

Autrement dit, le député Lefebvre vient de se prononcer, de façon indirecte mais sans aucun doute possible, pour une vraie liberté d’inscription à une assurance santé, et pas forcément dans le giron de notre étouffant système de sécurité collectiviste que le monde nous envie mais se garde bien de nous copier. C’est suffisamment remarquable pour le noter, voire en parler et relayer aussi bruyamment que possible son initiative.

Malheureusement, il ne faut pas se leurrer. En terme de coups médiatiques, le politicien n’en est pas à son premier essai et cette initiative a tout d’une tentative d’amener à lui les désabusés du désastre actuel qu’est devenu le RSI et, plus largement, la sécurité sociale. S’il peut peut-être se faire entendre pendant cette période des primaires, son manque de parrainages mettra bien vite fin à son exposition médiatique.

Et outre cet écueil d’appareil politique dans lequel il joue le modeste rôle d’un petit trublion, il reste celui, bien plus gros, de l’écueil social que représente l’attaque frontale de la sécurité sociale. Même si, chaque jour qui passe, les appels de cotisations délirants, les dossiers perdus, les paperasseries débiles, les courriers iniques ou tout simplement grotesques, les envois d’huissiers, même si tous ces éléments provoquent chaque jour des faillites et du chômage, même si des commerces ferment directement à cause de l’incurie du RSI ou de l’incompétence de ses services, même si des individus mettent fin à leurs jours de n’avoir jamais pu trouver de solutions aux problèmes kafkaïens que la Sécu provoque régulièrement, les Français ne voudront jamais entendre que ce système est, de la base au sommet, de long en large et de droite à gauche, complètement pourri, vermoulu sous des années de gabegies, d’incompétences, de mauvaise gestion paritaire et de compromis boiteux.

Le système de Sécurité Sociale à la française n’a plus rien d’un système répondant à des lois : ce n’est plus qu’un État dans l’État, qui répond exclusivement à son propre besoin de rester en vie, en pompant sans cesse sur des cotisants captifs pour ses besoins toujours plus grands. Dès lors, tout changement drastique ne pourra pas venir de lui.

Sauf à le mettre à bas, définitivement, il perdurera. Quitte à tuer son hôte.

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23 Comments

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  • 0 / 10
  • Esope , 27 février 2016 @ 9 h 02 min

    Il faut soutenir ce député…. Il a toute les chances d’avoir les parrainages recquis, les petits maires sont souvent des “victimes” de l’URSSAF, de la MSA ou du RSI.

  • mordela , 27 février 2016 @ 9 h 13 min

    anecdote;j’ai été traduit devant le tribunal de la SS pour 35f (en dessous de 30f,ils ne poursuivaient pas !!!!!!!!!!!!!
    qui a entendu parler de Mr Urssafian à l’urssaf des B d Rh.C’était il y a une bonne cinquantaine d’années.Le compte a été vidé la veille du jour ou l’affaire a été découverte

  • lilou 35 , 27 février 2016 @ 9 h 58 min

    Trop facile de vivre sur le dos de la société, maintenant nous avons en plus la misère du monde qui vient vivre à nos crochets, et un certain public l’encourage !!
    c’est l’égalité au vrai sens du terme, nous aurons bientôt plus que des miséreux
    l’égalité aura gagnée.
    Après l’ouverture de nos frontières on nous demandera l’ouverture de nos maisons
    puis celle de nos bras et des parties de notre corps les plus sensibles à moins de porter le voile. Quelle triste réalité bien orchestrée. Faudra t-il une révolution pour nous en sortir ? Au 21 e siècle es ce encore possible ?

  • lilou 35 , 27 février 2016 @ 10 h 04 min

    Trop facile de vivre sur le dos de la société, maintenant nous avons en plus la misère du monde qui vient vivre à nos crochets, et un certain public l’encourage !!
    c’est l’égalité au vrai sens du terme, nous aurons bientôt plus que des miséreux.
    L’égalité aura gagnée.
    Après l’ouverture de nos frontières on nous demandera l’ouverture de nos maisons
    puis celle de nos bras et des parties de notre corps les plus sensibles à moins de porter le voile. Quelle triste réalité bien orchestrée. Faudra t-il une révolution pour nous en sortir ? Au 21 e siècle es ce encore possible ? Aurions nous la classe politique la plus bête du monde ?

  • François2 , 27 février 2016 @ 10 h 42 min

    Le petit Pépère du peuple, roi des condescendants.

  • abramovitch , 27 février 2016 @ 11 h 29 min

    Nul n’ignore que la France,qui sait s’octroyer toutes les palmes,demeure le pays du gaspi et des abus en tous genres.Depuis des décennies nous constatons les excés de toutes sortes,occasionnés par de petits et astucieux malins,habiles à gruger tout le monde.Parmi ces génies ,des gens lesquels n’avaient jamais mis les pieds en France,percevant des RMI des RSA,auquels se greffaient ensuite des retraites,concomitamment avec les nombreux avantages liés aux soins.De riches entrepreneurs profitaient gratuitement avec leur épouse de cures thermales,sortes de vacances payées aux frais de la princesse.Ces avantages illimités ne se remarquaient pas en périodes de vaches grasses et moins encore en l’absence d’internet,où les nouvelles s’obtiennent à la vitesse de l’éclair.D’autres,”Monsieur tout le monde” occupant des postes de responsabilités se mettaient volontairement au chomage afin de réformer leur maison.Avec le regroupement familial comme le fit remarquer en son temps le Président Chirac,promoteur de celui-ci en tant que premier ministre de VGE,des vagues de familles,principalement maghrébines,accoururent dans notre pays de cocagne et bénéficièrent d’allocations généreuses,à faire palir nos concitoyens aux familles peu nombreuses.Avec son humour cocassien,notre correzien,avait conclu qu’avec toutes ces libertés généreusement offertes,nous héritions en contrepartie de toutes sortes d’odeur,principalement celles de moutons égorgés dans les baignoires.Ce qui me surprend,c’est que l’Espagne pays aussi vaste que le notre,avec un PIB d’un peu plus de la moitié du notre,offre à sa population un service de santé qui n’a rien à nous envier,avec des hopitaux accueillants, dotés de personnels de santé bien formés et empreints d’humanité,le tout dans un environnement d’une propreté inégalée.Nous savons d’autre part qu’aucun de nos responsables ne désire changer quoi que ce soit,à un système dispendieux dont ils se savent les principaux bénéficiaires.Nos services fiscaux condamnés à rembourser certains de leurs contribuables imposés à tort,font constater là aussi que ces mêmes services usent de subterfuges pour retarder les remboursements alors qu’ils n’hésitent pas à appliquer des pénalités de retards dès le moindre dépassement.
    Non la France n’attire plus et beaucoup de ses ressortissants souhaitent la quitter.Que dire de la locomotive allemande qui ne sait pas où sont passés 130.000 émigrants dont 10.000 mineurs.Tout cela à un relent d’amateurisme dont le coût sera exponentiel.

  • KAMISAN , 27 février 2016 @ 12 h 31 min

    Cette sécu est en théorie un excellent système de protection…toutefois, , en pratique, une malicieuse force agissante est venue y apporter une touche d'”universalité” au sens le plus large possible, qui a ouvert le système à un certain “parasitage” non prévu par les fondateurs…
    Que le dernier arrivé sur le territoire puisse profiter d’un système de protection sociale, plein pot, même s’il est polygame, même s’il est plein de ressentiment envers ce pays pour des raisons religieuses, culturelles ou autres est logiquement suicidaire à terme…

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