Quelques réflexions sur le Dies Irae du 26 janvier prochain

Une nouvelle plateforme « logistique », Jour de Colère, se charge, à la suite des manifestations du printemps dernier, d’agréger les différentes luttes contre le pouvoir et les institutions en place, qu’elles soient fiscale, pour la sécurité, pour l’armée, pour la préservation du système scolaire… Chacun aurait une raison d’être en colère contre le gouvernement selon le manifeste du collectif.

Sous l’apparence de neutralité, la plateforme puise ses sources dans le refus du mariage gay et de ses suites : PMA, GPA, théorie du genre et évoque dans un élan songeur la « coagulation » en rêvant de Bonnets rouges à la bretonne, de révolte, d’un sursaut spontané des français.

Jusqu’il y a quelques semaines, la coagulation était la peur du gouvernement, les conseillers de l’exécutif craignaient la convergence des luttes évoquées plus haut. Jusqu’il y a quelques semaines, puisque force est de constater que la coagulation ne se produira pas tout de suite et sûrement pas le 26 janvier, jour de la manifestation nationale organisée par la plateforme. Car si le mécontentement anime beaucoup de Français, peu sont déterminés à se mobiliser. En rêvant d’une manifestation comme celle des Bonnets rouges, la plateforme semble oublier que les Bonnets rouges de Carhaix étaient plus que divisés sur la question de la coagulation. En réalité, peu accordaient une quelconque importance au fait que la révolte s’étende au reste du pays.

En écoutant le cofondateur de la plateforme, les organisateurs n’ont « jamais rêvé d’une coagulation […], elle se forme d’elle-même ». La première tentative menée par cette nébuleuse fut l’organisation d’un « rassemblement apolitique de citoyens » sur le parvis du Trocadéro à Paris le 1er décembre. Alors que l’événement Facebook comptait 2 500 participants, la réalité montra 200 personnes.

En affichant pléthore de soutiens tous plus fantomatiques les uns que les autres, la plateforme veut croire à une manifestation d’ampleur dont le nombre de participants sera moins important que leur détermination.

Si nous comparons la Manif pour Tous et ses suites à une bombe nucléaire politique en raison des conséquences qu’elle aura dans l’avenir, les groupes informels comme le Camping Pour Tous, Prisonnier Politique, Solidarité pour Tous représentent un nuage radioactif qui dispense ses spores au plus près de l’impact mais qui se disperse par le vent et par le temps pour devenir rapidement inefficace. En effet, aujourd’hui, ces groupes ne représentent plus personne et appartiennent désormais au passé. Restent les contacts noués qui pourront peut être servir de nouveau dans le futur. Supputons aussi que ces collectifs soutenant la plateforme sont en fait formés des mêmes personnes, que les cercles concentriques ne s’étalent que trop peu pour pouvoir atteindre tous les mécontents…

Si pour certains, la Manif pour Tous est un échec en ce qu’elle a perdu la bataille qu’elle s’était engagée à mener, le Jour de Colère n’est pas l’armée qui permettra d’obtenir quoique ce soit, sinon des bleus acquis pendant de puériles bagarres avec les forces de l’ordre.

Si la Tradition est critique, alors le sursaut spontané n’existe pas. Le sursaut est un aboutissement et un commencement. L’aboutissement d’un long travail de fond qui vient à peine de commencer, sans rapport avec le Jour de Colère. Bien que celui-ci se positionne contre l’islamisation, il ne faut pas oublier que la Reconquista a duré 7 siècles. Si l’on peut considérer la révolution française comme un sursaut, celui-ci fut préparé longuement dans les esprits, même au plus haut degré de l’État. Ce changement, le poète de Martigues le montra en écrivant à propos des têtes des monarques martyrisés : « Avant d’être tranchées, elles se retranchèrent ; on n’eut pas à les renverser, elles se laissèrent tomber ». Cette révolution ne prit pas un sombre jour de juillet 1789, elle se fomentait depuis plusieurs décennies.

Le sursaut est un commencement. Que fait-on après ce sursaut ? Tout le monde rentre-t-il chez lui ? La constituante ? La guillotine ?

On l’a vu, le sursaut n’est jamais spontané, surtout lorsqu’il s’applique à être cantonné lors d’une manifestation. La préparation de ce sursaut espéré le 26 janvier nécessite au minimum un esprit, admettons celui de la jacquerie, et un maillage. Le maillage est ce qui permet de maintenir l’esprit, c’est par exemple ce à quoi les partis politiques se sont employés en ayant dans chaque canton une tête visible que l’électeur pourra identifier, c’en est de même pour toutes les organisations politiques au sens large qui doivent s’assurer d’avoir dans chaque secteur un représentant, le Jour de Colère en se donnant pour ambition d’agréger tous les mécontents ne peut pas échapper à cette logique. Or, qui sera la tête chez vous, le révolté contre le mariage gay ? Le révolté contre l’éco-taxe ? Le révolté contre l’équi-taxe ? La Manif pour Tous, appuyée par les réseaux catholiques – Alliance VITA, paroisses, AFC –, a ce maillage qui permet l’organisation de manifestations nationales, le Jour de Colère n’en dispose pas. La réussite réside dans la faculté d’organiser des rassemblements modestes dans chaque secteur évoqué plus haut, conférences, manifestations… pas dans l’organisation d’une manifestation ex nihilo.

Dies Illa, vous en ferez ce que vous en voudrez.

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39 Comments

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  • eljojo , 30 décembre 2013 @ 0 h 37 min

    L’auteur résume parfaitement le problème du Jour de Colère : les seuls qui veulent vraiment coaguler sont les plus radicaux des opposants au mariage gay, autrement dit, un petit monde, très fermé.
    Pour que cette coagulation marche, il faudrait qu’elle s’incarne dans une personne, dans un combat… le FN pourrait y arriver, mais cela n’entre pas dans leur stratégie de dé-diabolisation. Tout comme la Manif Pour Tous, d’ailleurs.

  • alain , 30 décembre 2013 @ 1 h 03 min

    le fait que les stipendiés ou partisans (rares) de la “Manif (soi-disant) Pour Tous pour tout argument se gargarise à qui mieu mieu de leur brillante démonstration “logistique” démontre à contrario la totale inefficacité politique concrète de la dite Manif.

    Les bretons moins nombreux, peut-être moins “organisés”, mais un peu plus “remuants” ont fait eux reculer (même provisoirement et tactiquement) le gouvernement sur le projet qui leur tenait à coeur.

    De toute façon le poisson pourrit par la tête et dès l’origine la “tête” de la LMPT était pourrie comme l’a montré le cas Frijide Barjot mis en avant dès le début et utilisé jusqu’à épuisement de son utilité.

    L’inefficacité concrète (et volontaire car c’est un choix) de l’équipe dirigeante de la LMPT finira par se voir et être sanctionnée par les masses qu’elle a touchée n’en doutez pas.

  • eljojo , 30 décembre 2013 @ 1 h 14 min

    Vous n’avez pas bien lu, je crois. La principale critique de l’auteur porte sur le caractère concentrique des différents mouvements sensés coaguler : beaucoup de mouvements, mais avec grosso modo les mêmes personnes.

  • Boutté , 30 décembre 2013 @ 7 h 41 min

    Hélas ,vous avez raison : sur le plan de la morale traditionnelle les chefs de ce parti sont aussi éloignés de nos valeurs chrétiennes que les autres .

  • dequoiquicause , 30 décembre 2013 @ 9 h 06 min

    Blabla et blabla.
    Ce qu’il faut c’est d’abord de l’action et de la détermination.
    Les déçus, mécontents, révoltés, écoeurés sont nombreux, nous sommes nombreux et nous voulons le montrer et aussi faire en sorte que ça change.
    Si nous ne faisons rien la société française sera réduite en miettes.
    Si c’est ce que vous voulez…alors ne bougez surtout pas.

  • Guy Lux , 30 décembre 2013 @ 10 h 25 min

    “Jour de Colère” avec Christophe Lambert, un nanard au cinéma.
    Jour de colère du 26 janvier, un nanard dans la rue?

  • Aristote , 30 décembre 2013 @ 10 h 59 min

    Complotons sérieusement

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