La singularité du christianisme

En ce jour de Pâques qui suit les attentats islamistes de Bruxelles, comment ne pas citer René Girard qui nous a quittés le 4 Novembre dernier. Le terrorisme et la guerre au nom d’une religion évoque le titre de son ouvrage le plus connu : « La Violence et le Sacré ». Ce peut être l’occasion d’appréhender la singularité du christianisme dont le rapport à la violence est original. « La religion vise toujours à apaiser la violence » écrit René Girard au début de « la Violence et le Sacré ». La confuse pensée commune de notre temps a quelque mal à accepter cette formule. Les horreurs commises par les barbares de l’Etat islamique comme la cruauté des attentats amènent certains à rappeler les guerres de religion, les croisades ou encore les exécutions des hérétiques ou des sorcières. Toutes les religions se valent en mal comme en bien, se dit-on, et, repoussant l’amalgame, il faut parler de l’islam, « religion de paix et d’amour ».

La lecture de René Girard nous apprend au contraire à distinguer la religion chrétienne. La violence n’est pas étrangère à l’humanité. Comme le disait Bachelard, « l’homme est une création du désir, non pas du besoin ». Le matérialisme est sur ce point une erreur fondamentale. « A chacun selon ses besoins » ne correspond en rien à cette donnée anthropologique essentielle : l’homme désire, et désire sans fin ce que l’autre désire. C’est cette concurrence qui éveille la violence mimétique. L’homme veut ce que l’autre désire et peut-être possède. D’une certaine manière, cette psychologie est présente chez nos terroristes belges ou français. Certes, ils se réclament de l’islam, mais ce sont pour beaucoup des délinquants de la société de consommation qui sont passés par les cases de la drogue, du vol et de la prison. Convertis, ils ont vécu une vie au-dessus de leurs moyens, une vie fantasmée qui ne pouvait facilement retomber dans la banalité d’une existence tranquille de petit travailleur ou dans la grisaille de la prison au long cours. Ils ont voulu ce que l’autre croit posséder et ils ont détruit l’autre en prétendant haïr ce qu’il possède.

Pour René Girard, c’est par le sacrifice du Bouc Emissaire que les religions contiennent cette tendance pathologique de l’humanité. Comme il le dit dans « Quand ces choses commenceront », « les religions païennes étaient quand même un premier chemin vers Dieu.. La pratique des sacrifices était bien une façon de contenir la violence à un niveau, non pas voulu, mais toléré par Dieu ». Pour sauvegarder la paix, il faut désigner un coupable, mobiliser toute la violence contre lui, et l’effacer pendant un temps en sacrifiant le porteur du péché. C’est là une donnée sociologique qui dépasse même les religions puisqu’on la retrouve dans la propagande totalitaire. C’est elle qui explique l’importance symbolique du film nazi, « Le Juif Süss ». La vengeance collective veut mettre un terme à la chaîne interminable des vengeances individuelles. Mais, et c’est tout le débat sur la peine capitale, « faire violence au violent, c’est se laisser contaminer par sa violence ». Cette pensée est évidemment au coeur du christianisme. Pâques est le jour de la résurrection de la victime sacrificielle, mais celle-ci était innocente, et elle inversait même le sens du sacrifice puisqu’elle faisait de Dieu le sacrifié et non pas le destinataire du sacrifice. Autrement dit, le christianisme exprime une volonté de ne pas se laisser contaminer, de transcender la violence. Le passage des Evangiles au cours duquel le Christ dissuade de jeter la première pierre d’une lapidation est évidemment le contrepoint de sa propre crucifixion. Mais nous avertit René Girard, échapper à la violence n’est pas sortir du mimétisme. C’est la « première pierre qui compte ». Celui qui la jette sera imité, mais le premier qui ne la jette pas sera lui aussi suivi. Alors, ce sera à nouveau de l’imitation. Peut-être nos sociétés chrétiennes par habitude en sont-elles là, incapables de jeter la première pierre, mais impuissantes à évacuer la violence.

Le christianisme est une religion de la personne. Elle peut inspirer les sociétés mais n’a pas à leur imposer un royaume qui n’est pas de ce monde. Elle demande un effort de liberté à chacun notamment pour s’arracher au mimétisme de la violence. A Ratisbonne, Benoît XVI citant un empereur byzantin qui dénonçait la volonté de l’islam de propager la foi par l’épée, avait, avec beaucoup de retenue, évoqué cette différence fondamentale entre les deux religions dans leurs textes et dans leur esprit (discours de Ratisbonne). Mais le mimétisme des médias l’avait condamné. Pour la plupart des musulmans, leur religion est encore sacrificielle, et en cela, elle participe à la paix sociale, mais en autorisant la guerre sainte elle développe une originalité symétrique du christianisme dont les musulmans doivent évidemment se délivrer. Comme le disent certains musulmans, le djihad (définition) ne doit pas se faire contre les infidèles, mais contre le mal qui est en soi. Puissent-ils être entendus !

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12 Comments

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  • Pascal , 30 mars 2016 @ 19 h 07 min

    « Certes, ils se réclament de l’islam, mais ce sont pour beaucoup des délinquants…» (Christian Vanneste).

    Comme le beau modèle Mahomet coupeur de route, voleur, violeur, assassin, massacreur à grande échelle, pédophile, nécrophile, etc…

    Beau modèle à imiter en tout point et dont les agissements et les dires sont source de la loi islamique. Pour mémoire le Coran n’est que pour 14% dans la loi islamique. Mais la Sira (biographie officielle de Mahomet) y est pour 26% et les hadith-s (dires et gestes rapportés de Mahomet et de ses compagnons) est à la source de 60% de la loi islamique.

  • Psyché , 30 mars 2016 @ 22 h 23 min

    L’Islam est est le moyen que les Maîtres du Monde ont trouvé pour supprimer la chrétienté et asservir les peuples.
    C’est le nouveau communisme du 21ème sciècle servant à la fois de religion et de garde-chiourme pour les Gentils.
    Le Kapo absolu piloté par les Maîtres.

  • Pascal , 31 mars 2016 @ 0 h 07 min

    L’islam n’a pas grand chose à voir avec le communisme. Il y a dans l’islam un profond mépris des travailleurs et des paysans. C’est le commerce qui est loué en islam, le« beau » modèle était commerçant et voleur. D’ailleurs le marché s’accommode bien de l’islam, beaucoup moins du christianisme.

  • Tonio , 31 mars 2016 @ 7 h 26 min

    Excellent article.Merci.

    Il est bien vrai que les musulmans ne supportent plus qu’on expose les différences entre les deux religions et leurs fondateurs; que leur évolution fût dévoyée par l’homme est incontestable, mais n’ôte rien à ce qui distingue, par les origines, le christianisme de l’islam:
    la première prônant l’amour de l’autre et le respect absolu de sa vie, quel qu’il soit, idée prenant ses sources dans l’A.T., fondée par un homme-Dieu de paix, qui jamais n’a fait l’apologie de la guerre, du pillage, de l’assassinat de l’Autre;

    la seconde, fondée par un chamelier inculte, pillard et viveur, meneur de rezzous, assoiffé de vengeance et de sang;

    il n’y a “pas photo”: la suite s’explique d’elle même, comme conséquence des origines.

  • Boutté , 31 mars 2016 @ 9 h 14 min

    Pas la peine d’en rajouter : la lecture du seul Coran nous suffisait pour exclure l’Islam de tout programme démocratique . Seuls les Evangiles sont porteurs de paix et de progrès, au prix du reste de la propre survie de son Eglise !

  • Boutté , 31 mars 2016 @ 9 h 18 min

    Selon vôtre analyse l’Islam est donc mieux compatible avec le Protestantisme qu’avec le Catholicisme . Lorsqu’on compare les cartes
    de la” soumission” et du Protestantisme on est tenté de vous accorder raison .

  • Boutté , 31 mars 2016 @ 9 h 23 min

    Vous êtes dans l’erreur . L’ancien testament est truffé de crimes, d’incestes, de tromperies variés, d’adultères et polygamie, de tueries allant jusqu’au génocide . La loi juive est du reste tout proche de la loi coranique .
    Il faut aller dans les Evangiles pour trouver les principes dont vous parlez .

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