La nouvelle île de France : Des mots pour dire et faire (2)

par Pierre-François Ghisoni*

Le titre de mon exposé le 26 avril 2013 au Carré parisien, L’Île, prolégomènes pour une fondation, doit être expliqué mot à mot.

Prolégomènes, d’origine grecque se traduit grosso modo par « discours préalable ». N’ajoutons pas des mots à des mots mais sachons nous en servir comme outils, comme les mots “pelle” et “pioche” ne prennent leur valeur qu’entre les mains de celui qui les manie, sur le chantier.

Chercher une origine grecque, c’est plonger en nos racines, sans négliger les autres, les latines, et bien entendu tous les phénomènes culturels et cultuels qui les ont accompagnées.

Mieux dit : la civilisation chrétienne dans ses fondements hébraïques, hellènes et latins, acceptés ou non, ne doit pas être évacuée de nos préoccupations.

Le passé doit servir d’appui à nos repères fondamentaux, et orienter la route à suivre.

Fondation : Les lecteurs de science-fiction reconnaissent la grande saga d’Isaac Asimov. Dans ce futur qui nous attire et inspire nos rêves et nos craintes, d’étranges personnages peuvent résider : nous-mêmes changés en nos nouveaux comportements et par nos nouvelles connaissances. Il peut s’agir d’autres que nous-mêmes, distants bien que présents. Pensons aux robots qui peuplent déjà notre univers : nommés machines-outils en nos ateliers, ils semblent obéir à l’homme au doigt et à l’œil, mais parfois ils occasionnent des accidents mal explicables. Craignons-les ou pas, ils sont là, mais nous aussi, et nous voulons rester humains, même dans le futur.

Mais pensons aussi à certains dévoiements d’humains qui portent les germes d’une catastrophe pire que l’imaginable de la science-fiction.

Les robots d’Asimov avaient un but et des lois précises bien utiles pour rappeler à leurs maîtres humains les fondements de la morale.

L’avenir qui attend nos descendants pourrait être celui d’esclaves robotisés sans même les bienveillantes lois de la robotique.

“Certains humains pris dans des illusions vertigineuses, à grands coups de faucille et de marteau réactualisés, coupent clair dans nos anciennes récoltes et détruisent nos temples, qui sont aussi les leurs. En fait, ils nous amputent, et eux avec, autant de nos repères du passé que de nos espoirs en l’avenir.”

Car certains humains pris dans des illusions vertigineuses, à grands coups de faucille et de marteau réactualisés, coupent clair dans nos anciennes récoltes et détruisent nos temples, qui sont aussi les leurs. En fait, ils nous amputent, et eux avec, autant de nos repères du passé que de nos espoirs en l’avenir.

Et si c’était là une maladie de l’homme occidental, où qu’il se trouve dans le monde ? Cette étrange maladie qui pousse aux pires mutilations de soi-même deviendra-t-elle, pour les historiens le marqueur spécifique de nos temps révolus, et de cette  étrange créature qui décida en quelques décennies d’abattre tous les ajustements par lesquels elle avait pu croître et se multiplier.

Notre présent est entre ce passé et ce futur. La clef de la réussite est de ne pas se lamenter en regrets stériles d’un passé qui ne reviendra pas, ni de s’effondrer devant l’arrivée certaine de ce futur, car, ce faisant, aucun navigateur n’aurait jamais pris la mer, aucun paysan n’aurait jamais semé, et aucun auteur n’aurait jamais cru bon d’écrire une ligne… sans compter que l’homme aurait disparu de la surface de la Terre, personne n’osant enfanter.

Il ne faut donc pas avoir peur d’enfanter un monde nouveau, à condition de ne pas jouer au démiurge, ou pire.

Il est légitime de poser en hypothèse que certains Français grands donneurs de leçons au monde entier bien que toujours aussi faibles en géographie, en langues étrangères et en économie, c’est-à-dire en compréhension des autres, trouvent en ces temps de rupture, l’occasion inespérée de laisser libre cours à leurs excès de sève, de l’épandre à la surface du globe, avant de s’en mordre les doigts.

Mais il est bien plus légitime d’affirmer que la grande masse française, dans le tréfonds de son âme – car les mêmes qui doutent de la présence d’une âme humaine, ne sauraient nier celle d’un peuple – la grande masse française donc, sent le péril et gronde.

Que deviendra ce grondement ? Le peuple français a-t-il encore les dents et les griffes, la tripe nécessaire pour délimiter et défendre ses deux territoires, le physique et le moral ? Le peuple est fauve, mais le fauve prêt à sortir ses griffes les rentre aussitôt que le dompteur lui a servi sa ration de viande. Il peut arriver cependant que le dompteur manque son coup…

Ces quelques lignes sur le peuple français pourraient en avoir choqué plus d’un. Tant pis et tant mieux ! Le temps des mièvreries est dépassé. Certains  briseront là. D’autres réfléchiront et trouveront en eux-mêmes la bonne voie.

Fondation, notre fondation doit rester une affaire d’hommes, avec tout ce que cela représente d’imperfections, d’erreurs, mais aussi de progression morale et technique. Des hommes attachés à conserver, défendre, poursuivre ce que la civilisation française a su créer de meilleur.

Alors, il est grand temps, pour ces derniers de franchir le premier obstacle et d’accepter la règle n°1 :

Plutôt que de brouillonner chacun dans son coin, l’action impose de mettre en commun les éléments de cette insatisfaction, d’en tirer les conséquences, de les traduire en écrits, de les porter.

*Pierre-François Ghisoni (blog) est écrivain et éditeur.

> partie 1

Pour bien comprendre le projet, lire :
La France ailleurs et toujours : la possibilité d’une île, par Éric Martin
Sécession, An I, par Pierre-François Ghisoni
La France, Louis de Bonald et l’émigration : la vraie patrie, par Philippe de Lacvivier

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28 Comments

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  • Francois Desvignes , 30 avril 2013 @ 10 h 08 min

    Puis-je vous faire respectueusement remarquer que nous en sommes en guerre, d’une guerre que l’on nous fait sans nous l’avoir déclarée, si bien qu’elle est aussi sournoise que meurtrière ou si vous préférez sournoisement meurtrière.

    Or, en temps de guerre,” la poésie en prose” de votre article retarde autant notre armement et notre riposte que si vous nous l’aviez adressé en alexandrins.

    Donc, je vais essayer de résumer de manière un peu plus militaire votre article :

    – Quand part-on à la castagne ? Tout de suite !
    – Avec quelles armes ? Toujours l’unité, d’abord l’écriture !

    Merci mille fois pour votre courageuse clairvoyance et à ceux qui vous critiqueront autrement que sur la forme, vous pourrez leur rétorquer que “la Foi sans les actes est morte !” (Jacques 1) et que le premier devoir d’un français est “de se lever, prendre sa civière sous le bras et marcher” (Mt 9 1-8)

  • Mdesplanteurs , 30 avril 2013 @ 10 h 51 min

    je suis assez d’accord avec Francois Desvignes, l’heure n’est plus aux belles phrases, prologues et prolégomènes. quand aura t’on un compte rendu précis et concret de ce qui a été dit le 26 avril? si quelque chose de précis a été dit!

  • Pierre-François Ghisoni , 30 avril 2013 @ 12 h 20 min

    Quoi que vous en pensiez, l’heure est à la réflexion pour l’action, et spécifiquement pour le long terme. Les feux de paille s’éteignent vite, quand ce ne sont pas des désirs de pyromanes. La pensée mène l’action. C’est en négligeant cela qu’on s’est fait f… dehors de tous nos territoires, et bientôt départements prétendus encore français. Si nous devons conquérir ou reconquérir quelque chose… et le garder, il faut s’habituer à penser d’abord.

    Maintenant, partez à la nage sans boussole si vous voulez. Je préfère armer un “canote”. Et si vous avez des solutions techniques pratiques, n’hésitez pas à les soumettre.

  • Frédéric B , 30 avril 2013 @ 12 h 41 min

    Oui nous sommes bien en guerre, son objectif est la destruction d’une civilisation par son remplacement, le théâtre des opérations est dématérialisé, l’arme de destruction massive n’est ni atomique, ni bactériologique, elle est psychologique, nous essuyons les premiers effets de tirs de bombes idéologiques dont le lancement n’a été détecté que très tardivement.

  • patrhaut , 30 avril 2013 @ 14 h 52 min

    c’est très français ça : “Plutôt que de brouillonner chacun dans son coin, l’action impose de mettre en commun les éléments de cette insatisfaction, d’en tirer les conséquences, de les traduire en écrits, de les porter.”
    car agir, ce serait allonger les mots et les explications de textes ? Agir, ce serait écrire alors ? Il fallait le dire :
    La France ailleurs et toujours : la possibilité d’un bouquin.

  • Pierre-François Ghisoni , 30 avril 2013 @ 16 h 16 min

    Le titre contient “dire pour faire”. Quant à réfléchir pour agir, cela vous insupporte-t-il ? Comme on dit à Marseille : Vous l’êtes ou vous le faites ?” Ecrire et porter” : savez-vous lire ? Peut-être souhaitez-vous une légion de lobotomisés ?

    On attend toujours vos propositions pratiques.
    Où? Quand ? Comment ? Sur quelle surface ? En quel climat ? Parlez-vous une langue étrangère? A quoi pouvez-vous servir d’utile ? Quels sont les points négociables ? Les non négociables ? Les sources de revenus à développer ? Combien pouvez-vous investir ? Etes-vous capable de vous passer de camembert ? De steak-frites ? De la manie de tout critiquer sans agir ? Avez-vous vécu hors de France ? Combien de temps ? Quels en sont vos commentaires? Qu’avez-vous mis en place en France pour tenter d’enrayer une certaine décadence?

    Commencez par répondre à ces questions et à présenter vos réponses.
    Car franchement, si notre démarche ne vous va pas, le reste du monde vous est ouvert. Et si vous savez tout faire, si vous avez tout compris, si vous êtes le surhomme adéquat, qu’attendez-vous pour agir?

  • Goupille , 30 avril 2013 @ 16 h 19 min

    Oh là là… Vous prenez des risques, car on ne doit qu’approuver ce projet.
    Ce sera l’île des béni-oui-ouis.

    “Grandissez un peu. Who’s stinking, fuck !”

    Vous avez bien lu : “Fuck !”
    Réponse qui m’a été assenée parce que je m’inquiétais d’une phrase qui disait (premier épisode) «…et aux financiers qui sauront ne pas manquer une excellente affaire», phrase qui laissait présupposer que cette île s’orienterait plus vers l’exploitation de style Saint-Bart que vers un paradis régi par la “doctrine sociale de l’Eglise”…
    Une EXCELLENTE affaire… C’est, au minimum, un appel du pied à la Banque protestante, cela.

    En attendant la suite, il ne faut pas penser, il ne faut pas émettre un doute, il ne faut pas énoncer une inquiétude.
    Il faut béer. Béons.

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