Montebourg aime tendrement l’inflation et les monnaies faibles

Lorsque la situation va mal, très mal pour le gouvernement, il lui faut, vite, trouver quelques distractions qui permettront aux journalistes de camoufler l’indigence de la politique menée derrière d’épais nuages de fumée médiatique. Heureusement pour nos clowns à roulette, il existe toujours un fort en gueule pour sortir une bêtise et mettre un peu d’animation, ou, à défaut, quelques millions par-ci, quelques millions par-là, et on résout un problème qui traînait en longueur.

Pour le problème et les millions, ça tombe bien : puisque le fiasco mémorable de l’écotaxe continue de faire des vagues puissantes au sein du gouvernement et dans tous le pays, on choisira de payer enfin la rançon des otages qui traînaient depuis un moment et, immédiatement, le bastringue médiatique se met en route. En l’espace de quelques heures, l’écotaxe passe en deuxième puis en troisième position dans les dépêches des agences, noyée par les images, les reportages exclusifs, les interviewes et les pénétrantes déclarations de pimpants ministres pour couvrir l’événement.

Il est vrai que ce n’est pas tous les jours qu’on peut libérer des otages. Mais comme de toute façon, l’État risque bien d’en être pour 800 millions d’euros de sa poche suite aux mésaventures de l’écotaxe, quelques millions de plus ou de moins pour faire libérer une poignée de malheureux passeront totalement inaperçus. Et l’avantage médiatique est déjà palpable.

Parallèlement, et pour être sûr de bien noyer aussi l’actualité économique, on fera intervenir nul autre que le frétillant Arnaud dont la principale des caractéristiques n’est pas la discrétion. C’est, de surcroît, un habitué de la déclaration fracassante de saltimbanque économique : on se souvient de sa célèbre saillie sur Mittal, saillie qui, à elle seule, lui vaudrait, dans tout gouvernement normalement constitué, une bonne mise en orbite géostationnaire à coup de pied au derche.

Pour rappel, il est toujours en poste à l’un de ces ministères croupions dont l’utilité, au-delà de la possible mise en scène médiatique d’un trublion politique, n’a jamais pu être démontrée (entre la date de création de son ministère et aujourd’hui, des centaines de milliers d’emplois ont été patiemment détruits, rendant les gesticulation du redresseur de production particulièrement ridicules). Et puisqu’il est toujours en poste, autant qu’il serve à quelque chose, par exemple en émettant un avis péremptoire et inévitablement idiot sur la monnaie, l’Allemagne et ses bonnes idées pour redresser encore un peu plus la France.

Et si je dit « idiot », ce n’est pas par méchanceté ; je me borne à constater que le petit Arnaud n’a, encore une fois, rien compris à l’économie mais s’empresse d’essayer de trouver une idée, peu importe laquelle, pour montrer qu’il existe (et, par la même occasion, remplir le contrat « distraction » qui lui incombe lorsque le pédalo gouvernemental prend l’eau de toutes parts). Il nous propose ainsi une bonne dévaluation des familles pour l’euro, de dix pour cent, parce que c’est un nombre rond, qu’il est petit et que ça se passerait tout seul :

« Dix pour cent, c’est 13 centimes, ce n’est pas la mer à boire et ce n’est pas une dévaluation, c’est le taux de change à l’équilibre par rapport à ce qu’est la réalité de la zone euro »

Ces 13 centimes, ce 10%, ce taux de change à l’équilibre, c’est encore un coup du Foutriac 2015 et de son programme ministériel Pipothron v2, entièrement basé sous le sabot d’un cheval, qui permet à n’importe quel ministre de sortir n’importe quel chiffre pour n’importe quelle occasion avec une assurance en béton armé.

Et ça marcherait forcément : 10% de dévaluation, ce ne serait pas du tout le synonyme, dans les mois qui suivent, d’une inflation au moins correspondante puisque les pays étrangers continueraient à l’évidence à faire confiance dans notre monnaie, que les consommateurs ne trouveraient pas l’essence plus chère, que les produits d’importation ne verraient pas leurs prix subitement relevés, etc. La dévaluation, c’est l’assurance, le mois où elle intervient, que des produits exportés se retrouvent effectivement moins chers. Et c’est aussi l’assurance, le mois suivant, que les produits importés se retrouvent effectivement plus chers. Joli calcul.

Selon Arnaud, cette manipulation de 10% permettrait la création de 150 000 emplois ! Quelle aubaine ! Dès lors, pourquoi ne pas dévaluer de 50%, ce qui nous fait 750 000 emplois créés facilement, pardi ? Ou mieux encore : dévaluons l’euro de 100%, comme le propose du reste la gentille Marine : dissolvons l’euro dans le franc et roule ma poule, les affaires repartent. Non ?

Comment ça, les pays étrangers auront du mal à nous faire confiance ? Comment ça, les exportations seront peut-être moins chères, mais les importations seront rapidement prohibitives ? Comment ça, notre dette, libellée dans une autre monnaie, risque de nous mettre en défaut de paiement ? Et si on la transforme en francs, hein, mes petits amis ? Non, toujours pas ? Nos créditeurs pourraient s’en débarrasser d’un coup, nous mettant, là encore, en défaut ?

Oh. Que vous êtes mauvaise langue ! Si Arnaud sort une si belle ânerieidée, c’est qu’elle a été validée par les plus hautes instances, comme — par exemple — le FMI (de Mme Lagarde, dite Christine « Les Clignotants Sont Au Vert »)… C’est aussi, à l’évidence, parce que les malheurs français sont exclusivement le résultat des politiques allemandes et bruxelloises : quand un pays comme l’Allemagne s’en sort, la seule explication valable est que c’est au détriment d’un autre, comme la France. Méchante Angela à Berlin. Méchant Mario à la BCE. Méchant José-Manuel à Bruxelles. Tous des méchants.

On peut bien demander de l’inflation, de la dévaluation et des arrangements bidons avec l’économie pour tromper les entrepreneurs et les consommateurs, mais la réalité ne se laissera pas tordre aussi facilement ; le problème, quoi qu’en dise Arnaud Le Preux Frétillant, n’est pas dans la monnaie ni dans la méchanceté de concurrents européens qui ne voudraient faire aucune concession. Non, le problème est, à l’évidence, dans le climat détestable qui s’est installé en France : comme le note à juste titre un récent article du Point, en l’espace d’un an et demi, chaque catégorie de Français aura été copieusement malaxé, broyé, choqué ou tabassé par la politique incompréhensible de l’actuel gouvernement. Les coups se sont abattus, la complexité administrative a atteint des niveaux inouïs, et l’insécurité, l’oppression voire la terreur fiscale sont devenues la seule norme tangible dans ce pays ; pas étonnant, dès lors, que faire des affaires, monter son entreprise en France soit devenu plus qu’un parcours du combattant, un véritable sacerdoce dont l’issue est bien trop souvent catastrophique voire fatale ; à présent, y créer sa boîte est plus difficile qu’au Rwanda. Belle performance !

L’évidence est à ce point lumineuse qu’elle aveugle les simples d’esprits comme Montebourg : non, mon pauvre Arnaud, ce n’est pas en bidouillant lourdement la monnaie que vous relancerez le moteur économique en France. Ce dernier est si grippé, si englué dans une fiscalité démentielle et une administration kafkaïenne que vos propositions ne feront qu’accroître le n’importe quoi bigarré qui règne dans le pays. Si vous voulez vraiment faire du bien aux Français, à la France et à son économie, mon brave Arnaud, je ne vois qu’une solution : laissez nous tranquille. Partez. Fichez le camp. Oubliez-nous.

Et si vous le pouvez, partez avec le reste de la troupe de cirque qui vous entoure, depuis l’Élysée jusqu’à Matignon.

> h16 anime le blog hashtable. Il est l’auteur de Égalité taxes bisous.

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39 Comments

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  • Bernard , 2 novembre 2013 @ 10 h 11 min

    OH mais dans l’ UMPS ils sont tous aussi nuls, ne pensent qu’à eux, simplement !!
    Lisons, sortons de ce carcan politique et ouvrons à des informations concrètes !
    http://www.kontrekulture.com/categorie/11/Livres/Sionisme%20&%20Judaïsme

  • Charles , 4 novembre 2013 @ 20 h 17 min

    H16,

    En règle générale vos billets sot bien troussés et bienvenus.

    Permettez moi cependant que sur la question de la politique monétaire
    de la BCE,vous vous plantez complètement et avec brio.
    Ceci dit sans rancune ni méchanceté.

    Je veux bien croire que Montebourg (yakafokon)ne soit pas une référence
    sur le sujet.

    Je veux bien croire que son chiffre de 10% est une farce de plus.

    Pour autant si il est évident que les politiques actuelles d’austérité
    ne servent à rien,c’est précisément parce que elles ne peuvent être accompagnées d’un ajustement monétaire qui soit ciblé
    sur les pays du club med dont la France fait partie
    (France-Italie-Portugal-Espagne-Grèce ou encore FRITPORTEG).

    Toute la tragédie des pays du Sud se joue sur ce point central .
    Savez vous seulement comment fonctionne une politique monétaire
    de banque centrale nationale (BCN)???

    Connaissez vous l’impact d’une variation du taux directeur
    d’une BCN sur tous les autres taux d’un marché Monétaire ?,

    Vous avez dit “taux de change” sans vous rendre compte
    que cette formule,utilisée par les “gouverneurs de la BDF
    comme par les zornalistes officiels signait en soit votre confusion.

    Si vous aviez ,ne fusse que une fois dans votre vie,pris place aux cotés
    d’un cambiste face à ses écrans,vous sauriez que en France un “taux”
    porte nécessairement sur un taux d’intérêt et que l’expression “taux de change” pour un cambiste français travaillant à Paris est aussi bizarre
    que le serait la formule ” tapis volant électronique” pour un marchand de tapis.

    Une politique monétaire se définit soit en offensive soit en défensive.
    Le tout étant de savoir qui prend l’initiative,le marché,un opérateur etc ???

    Pour faire simple et court,j’attire votre attention sur un tableau
    très simple que vous devriez connaitre;
    A savoir les variations de change entre $ et Euro depuis 2012.
    Ce tableau étant comparé aux suites de niveaux des taux directeurs Centraux (TDC) des 2 BCN

    Vous auriez constaté que au commencement,l’Euro était
    autour de la parité de 1 pour 1 avec le $ avec cependant des écarts de TDC.

    il s’agit de comparer les 2 suites de mesures ,
    les parités de Change et les taux (TDC) pour les mêmes périodes.

    Donc nous avions des cours autour de 1 pour 1 et ceci était considéré
    comme raisonnable par tous les commentateurs “pro Euro unique”.

    Depuis,le $ a baissé conformément au souhait de la fed pour perdre
    plus de 30% de sa valeur avec un taux TDC de 0.25 %
    comparé au taux TDC de 0.75 pour la BCE.

    Soit un taux directeur de la BCE qui est 3 fois plus élevé
    que le taux de la fed (0.25 x 3=0.75) .

    Loin de moi de vouloir dire qu’un ajustement de monnaie
    est un exercice simple et facile avec des bénéfices garantis.

  • Charles , 4 novembre 2013 @ 20 h 31 min

    quelques typos dont le parcours de la parité $/€ depuis 2002 et non pas 2012.
    Vous citez également l’argument du 5eme pastis concernant le fait que notre dette publique est libellée en euro et que donc un retour sur un franc dévalué entraînerait une augmentation d’autant de notre dette.

    La réponse est très simple;Accrochez vous,merci;

    En 2001/2002 quand les encours initialement libellés en Franc
    ont été convertis en euros du jour au lendemain,avez vous consulté,à la fois les emprunteurs comme les prêteurs sur un changement significatif des conditions d’un opération qui avait pris naissance à une date antérieure ????
    La réponse est non.personne ne fut consulté
    et aucune objection n’était même envisagée par les autorités.

    Pourquoi ce qui était “justifié” en 2001/2002
    ne serait pas justifiable en 2014,???

    A savoir la conversion d’autorité (comme en 2002) des dettes passant de la dénomination euro unique
    à la dénomination euro-franc.

    L’euro franc étant un franc adossé a l’euro monnaie COMMUNE,
    mais ayant sa PERSONALITE propre avec une parité de change
    sous contrôle et un taux TDC “dirigé”.

  • Libre , 4 novembre 2013 @ 23 h 12 min

    Je crains que ce monsieur n’a pas décollé son nez des ouvrages de Keynes ou de Marx!Je rappelle que la France fut prospère sous le nouveau franc fort et stable établi par le Général de Gaulle qui reposait indirectement sur le standard-or!Donc il faut d’urgence:
    1.Revenir au Franc avec un mandat clair de la banque de France qui veillera à la stabilité de son pouvoir d’achat;
    2.Rétablir le standard-or au moins partiellement comme en Suisse ( 40% du franc suisse devait être constitutionnellement . couvert par de l’or).
    3.Rétablir le Glass-Steagle act
    4.Réduire les dépenses publiques aux alentours de 30% du PIB.
    Et monsieur Montebourg doit se taire au lieu de dire des bêtises qui nous ont ruinées par le passé et se mettre sérieusement à étudier des auteurs sérieux comme Rueff et Fekete!

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