Lettre ouverte à une sœur catholique qui aime la division

par Myriam Picard* pour Nouvelles de France

Mes articles sur le débat autour de la pièce “Sur le concept du visage du fils de Dieu” (ici et ) auront suscité de nombreuses réactions, des soutiens, de la colère, de l’indignation, de la sympathie. J’entends la souffrance de mes frères et sœurs catholiques devant les quotidiennes attaques infligées à ce qui nous fait vivre, à ce qui anime notre existence, à ce qui lui donne un sens. J’ai en commun avec vous cette blessure béante de voir Celui que nous aimons, son Vicaire, ses prêtres, ses religieux, et tous ses enfants catholiques et chrétiens, caricaturés dans les media, salis par ceux qui les ignorent ou les haïssent. J’ai bien du mal à porter paisiblement la croix des attaques qui nous sont perpétuellement faites. J’ai souvent eu envie, devant la violence du mensonge institutionnalisé à notre égard, de réfuter tout le message évangélique pour ne plus écouter que mes tripes et mon ire personnelle, et injurier copieusement les responsables de cette situation.

Mais je refuse, pour autant, d’alimenter ce climat de division qui blessa l’Eglise il y a des années, et ressurgit aujourd’hui alors que nous avons un Benoît XVI et l’espoir d’un rapprochement entre nos frères de la Fraternité Saint Pie X et le Saint-Siège. Je ne souhaitais pas rentrer publiquement dans ce débat, mais l’indignation qui m’a soulevée à la lecture d’un commentaire fait à un de mes articles m’a décidée à le faire. 

Une lectrice, en effet, commentant ma critique du spectacle de Roméo Castellucci, m’a écrit le message suivant : « Presque tous les catholiques qui s’insurgent contre cette pièce ont ceci de commun qu’ils prient régulièrement selon la liturgie bimillénaire de l’Eglise, chargée à ras-bord de sacré. C’est le cas de la dizaine d’évêques qui ont pris officiellement position en envoyant un courrier manuscrit à Civitas (Mgr Centène, Mgr Aumônier et d’autres confrères), du métropolite syriaque dont les fidèles chaldéens et araméens ont répondu en masse à son appel, du monastère bénédictin du Barroux, des prêtres de la Fraternité St-Pie X, de la Fraternité St-Pierre et de l’Institut du Bon Pasteur qui ont participé eux-mêmes aux manifestations en tête de ligne. Tous les catholiques qui trouvent cette pièce acceptable ont ceci de commun qu’ils ne fréquentent pas, ou plus comme c’est votre cas, la liturgie antique de l’Eglise, mais un rite nouveau et dépouillé de sacré jusqu’à la plus extrême limite, la misère représentative la plus concrète. C’est le cas de l’Abbé Grosjean, des dominicains de Paris, des bénédictins de Toulouse et de vous-même. Conclusion : les seules personnes qui trouvent cette pièce « chrétienne » et qui nient sa profanation du sacré sont précisément celles qui n’ont pas de rapport quotidien avec la représentation du sacré. CQFD. »

Que veut dire cette internaute ? Ma foi, quelque chose de très simple : il y aurait « les bons catholiques », c’est-à-dire les tradis, et puis les autres, fidèles d’« un rite nouveau et dépouillé de sacré jusqu’à la plus extrême limite, la misère représentative la plus concrète. » Par votre virulence, Madame, par la violence de vos propos, vous êtes en train d’insulter des millions de prêtres qui disent quotidiennement cette messe, humblement mais avec tout leur cœur, vous insultez leur sacerdoce, vous insultez les âmes qu’ils mènent quotidiennement à Dieu, par le sacrifice de joies humaines (mariage, enfants, carrière professionnelle, etc), grâce aux sacrements qu’ils donnent. Vous insultez les morts qu’ils enterrent, les couples qui s’unissent sous leur regard. Vous insultez le prêtre qui me permit de ne pas sombrer dans la révolte quand j’étais adolescente, un autre encore qui m’apprit à faire oraison, un troisième qui me confessa alors qu’en pleine nuit je frôlai le désespoir absolu, un quatrième qui conduisit mon mari sur le chemin de l’espérance chrétienne, un cinquième qui nous prépara au mariage et dont l’homélie qu’il prononça à cette occasion reste pour moi, dans les moments difficiles de la vie conjugale et maternelle, une référence en matière d’abandon à Dieu et à sa miséricorde. Vous insultez des bénédictins, des franciscains, des clarisses, des prêtres, vous insultez ces prêtres béninois grâce auxquels les habitants de campagnes reculées peuvent encore communier et se confesser. Vous insultez un Monseigneur Rey, un Monseigneur Batut, un Monseigneur Aumônier, un Monseigneur Aillet. Bravo. C’est édifiant.

Par la haine qui transpire de vos propos et qui ne manquera pas d’indigner les âmes de bonne volonté, vous risquez de convaincre que les imbéciles et les entêtés seraient du côté de la Tradition, vous ruinez le patient travail que des esprits courageux mènent, d’un côté comme de l’autre, pour l’unité de l’Eglise et l’amour du Christ. La sœur de deux prêtres « tradis » que je suis est infiniment blessée de voir que grâce à vous, le magnifique sacerdoce de ses frères se verra une fois de plus attaquée par votre aveuglement et votre sottise. Ils n’insultent pas « les gens d’en face », eux, Madame, ils ne disent pas à des millions de catholiques ce que vous leur crachez au visage, non ! Ils ont tout abandonné pour être tout à tous, témoins de cet amour brûlant et crucifié, ils portent une soutane qui leur vaut des regards agressifs mais provoque également des rencontres avec le Christ. Ils ont sacrifié leur existence terrestre, comme tant d’autres, pour que vous puissiez bénéficier d’une liturgie magnifique et de l’accès aux sacrements. Alors même que vous m’écriviez ces mots dégoulinants de mépris, ils lisaient sans nul doute leur bréviaire à l’intention des âmes qui souffrent et qui pèchent. Et vous débarquez, avec votre bannière d’intolérance, vous faites du rite extraordinaire un outil de division, alors qu’il est précisément le signe de la puissance d’une Eglise qui conduisit des millions d’âme à l’amour de Dieu.

Vous écrivez que « Tous les catholiques qui trouvent cette pièce acceptable ont ceci de commun qu’ils ne fréquentent pas, ou plus comme c’est votre cas, la liturgie antique de l’Eglise, mais un rite nouveau et dépouillé de sacré ». Vous avez de la chance, Madame, d’avoir la science infuse. Ayant personnellement interrogé de nombreux manifestants, j’ai pu constater que non seulement ils n’étaient pas tous traditionnalistes, mais aussi qu’il y avait des membres de l’Emmanuel, des Béatitudes et aussi ceux que vous nommez sans doute de simples « conciliaires ». Sur l’autre rive, le constat est le même, la « population sociologique » est tout aussi diverse. J’ajoute enfin – et même si cela m’étouffe de vous parler de ma vie de paroissienne et que je ne devrais pas avoir à le faire – que contrairement à ce que vous pensez, je fréquente dès que j’en ai la possibilité géographique, des paroisses où le rite Saint Pie V est célébré.

A la lecture de votre billet, je devrais conclure ceci : le Père Daniel-Ange n’est pas un bon catholique, Mère Térésa et non plus, et sans nul doute, finalement, un abbé Grosjean ou un abbé Cariot qui se démènent pour évangéliser patiemment et passionnément notre terre française.

Qu’il y ait des problèmes, une crise, des débats : oui. Mais que vous vous permettiez des jugements aussi manichéens, aussi binaires, aussi primaires, voilà qui me révolte et voilà qui m’indigne. C’est ce type d’attitude intrinsèquement perverse qui provoque deux types de scandales : des prêtres qui refusent à leurs paroissiens ce qu’exige pourtant un Motu Proprio, ou qui refusent de serrer la main à des membres de la Fraternité Saint Pie X ou Saint Pierre ; et d’autres prêtres encore qui se permettent de traiter d’apostats ceux qu’ils nomment « les pseudo clercs conciliaires. » Même haine, même bêtise, mêmes crachats lancés sur le Christ.

Vous avez peut-être la chance, contrairement à moi, de bénéficier de la présence d’une paroisse tradi près de chez vous : allez-y le plus souvent possible, Madame, et priez bien, dans les semaines qui viendront, pour que votre attitude, dont je sais qu’elle est hélas plus fréquente qu’on ne le pense, ne sape pas l’espoir d’un rapprochement qui est dans tous les cœurs et sur toutes les lèvres des hommes et des femmes de bonne volonté.

En vingt-six années d’existence, j’ai eu la chance de prier en latin et en français. J’ai eu le malheur, quelquefois, d’assister à des messes où l’on nous gavait de chansonnettes crétines et de « sermons » nous enseignant doctement la beauté de l’islam. J’ai souffert, ailleurs, d’entendre des homélies où l’on nous expliquait à demi-mots que le siège de Rome n’était peut-être pas vacant, non, mais que celui qui l’occupait ferait mieux de déménager ailleurs. Mais, plus que tout et par-dessus ces souffrances et ces offenses faites à la liturgie, à la doctrine sociale de l’Eglise, à notre Credo à tous, j’ai d’abord et avant tout eu le bonheur de prier, de communier, d’être confessée par de saints prêtres de toutes les chapelles, aussi bien de la Fraternité Saint Pie X, que de la Fraternité Saint Pierre, que du Christ-Roi, que de l’église Saint Louis d’Antin ou Saint Léon. Au pèlerinage de Chartres comme à Lourdes, j’eus la grâce à maintes reprise de revoir l’absolution de prêtre portant soutane et clergyman qui me remettaient dans les bras du Seigneur. Et je dois personnellement beaucoup à une Sœur Marie Faustine qui m’enseigna et m’enseigne encore, par son exemple, ce que signifie le saint acharnement de la prière.

Ayez donc une seule fois le courage d’un abbé Grosjean qui ose investir des débats de société avec audace, fermeté et sérénité, alors même que les seuls « curés » appréciés des media se nomment Gaillot et La Morandais, et vous viendrez ensuite me parler de fréquentation du sacré.

Quand les paroisses seront vides, que les murs de nos séminaires et de nos monastères pleureront de solitude, que des âmes, faute de prêtres, partiront vers le Père sans avoir pu se réconcilier avec lui, j’espère que vous serez contente du travail effectué par vous et tous ceux qui partagent votre détestable point de vue.

*Myriam Picard est journaliste et membre du Comité de rédaction de Riposte Laïque.

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40 Comments

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  • Jean-Pierre , 31 octobre 2011 @ 19 h 46 min

    @ Robert,
    Si vous apporter la contradiction s’appelle pour vous “insulter”, je suis désolé d’avoir heurté votre sensibilité, voire votre susceptibilité à fleur de peau. Vous vous auto-complaisez dans un passé que vous présentez comme héroïque… peut-être, mais cela n’a rien à voir avec le propos ! Je répète : nous n’acceptons pas que les catho-modernos planqués et couchés devant le Système viennent se présenter ici ou ailleurs comme “catholiques” et donner des leçons de morale à tout le monde, discours subversifs destinés à tromper, à démobiliser les troupes, et à justifier par de faux principes leur couardise congénitale, leurs bassesses de capitulards frileux et pisseux. Soutenez votre petite chérie laïciste si ça vous chante mais nous ne vous laisseront pas tirer dans le dos de nos camarades. C’est compris ?

  • Polydamas , 31 octobre 2011 @ 20 h 48 min

    Ange au sourire, je ne suis pas certain qu’il y ait des termes suffisamment précis pour qualifier ce que vous faites. Il faut vraiment que je fasse un billet sur les diablotins portant avec orgueil la bannière du Christ. Lisez “la foi des démons” d’Hadjadj, très cher Ange…

  • Robert , 31 octobre 2011 @ 21 h 23 min

    Jean-Pierre,
    Comme d’habitude, vous essayez de détourner la conversation de l’essentiel.
    Vous dites
    “Quand les diviseurs pleurent la division… à mourir de rire !!! Au lieu de critiquer les catholiques qui ont le courage de descendre dans la rue pour défendre l’honneur de Notre-Seigneur, vous feriez mieux de les soutenir et de serrer les rangs. Qu’auriez vous fait en 1793 ? Pour vous les Vendéens avaient sans doute un « QI tout spécialement bas » !
    Qu’auriez-vous fait en 1905 lors de la séparation spoliation ? Pour vous les catholiques qui empêchaient les militaires de forcer la porte des églises étaient de dangereux complotistes !
    Du haut de votre bourgeoisie conformiste, tolérante, ouverte et conciliante avec le monde et ses pompes, cela doit vous paraître horrifiant… Les jeunes exemplaires qui tous les soirs s’engagent méritent le respect et n’ont absolument AUCUNE leçon à recevoir des petits planqués qui tirent dans le dos des gens !!!”
    SI on connaît le sens des mots et des accusations dans votre milieu très particulier, ou on est entre soi bien au chaud, que j’ai fréquenté longtemps, si ces lignes ne sont pas volontairement injurieuses, qu’est-ce que c’est?
    Si ce n’est pas injurieux dans votre esprit, je n’aimerais pas écouter vos compliments.
    Je n’ai aucune complaisance envers moi ou quiconque. Ne détournez pas encore le fil, c’est vous qui avez prétendu me donner des leçons et je vous ai mouché comme un morveux.
    C’est aujourd’hui que je pourrais encore vous donner des leçons de respect et d’humilité.
    Mais à votre différence, je ne donne pas de détails, je ne me mets pas en avant comme vous le faites. La complaisance, elle st dans votre propos dégoulinant d’auto-satisfaction.
    Et vous continuez, c’est maladif, avec;
    “couardise congénitale, leurs bassesses de capitulards frileux et pisseux. ”
    Je vous souhaite, ce n’est pas une menace comprenez-le bien, de ne pas avoir à me rencontrer en face. Cela pourrait venir dans une occasion future.
    Car c’est moins facile de répéter ce genre de diarrhée verbale quand on a le destinataire devant soi. Et vous verriez ce que l’ironie froide et le rire peut faire tomber les masques des prétentieux. Car vos propos ne méritent rien d’autre que la dérision.
    Et rassurez-vous pour mes nerfs, ils sont bien solides. Pour les vôtres, j’ai un doute!
    Quand à ma susceptibilité, ce serait du gâchis de tomber là-dedans alors que vous m’offrez de telles occasions de rigoler à peu de frais. Franchement, c’est plus intéressant. Merci encore pour ces bons moments.
    Sans rancune!

  • Jean-Pierre , 31 octobre 2011 @ 21 h 38 min

    “Je vous souhaite, ce n’est pas une menace (sic !) comprenez-le bien, de ne pas avoir à me rencontrer en face. Cela pourrait venir dans une occasion future”…
    La violence est l’argument des faibles qui n’en ont plus ! Petit voyou de pacotille, vos menaces par prétérition ne m’ébranlent aucunement : cela me passe dessus comme de l’eau sur les plumes d’un canard ! Vos perdez vos petits nerfs très très sensibles, et j’ai bien compris que vous ne supportiez pas la contradiction et surtout la correction (vous persistez à ne pas me répondre sur le fond, et pour cause, et à me raconter votre vie banale… il y a des psychanalystes pour ça !) : j’en suis bien désolé pour vous mais vous ne nous ferez pas abdiquer. Allez pleurnicher chez votre thérapeute et cessez de semer la division et la dispersion !

  • Robert , 1 novembre 2011 @ 13 h 19 min

    Jean-Pierre,
    Ou voyez-vous de la violence dans mon propos. Je le réitère;
    “Je vous souhaite, ce n’est pas une menace comprenez-le bien, de ne pas avoir à me rencontrer en face. Cela pourrait venir dans une occasion future.
    Car c’est moins facile de répéter ce genre de diarrhée verbale quand on a le destinataire devant soi. Et vous verriez ce que l’ironie froide et le rire peut faire tomber les masques des prétentieux. Car vos propos ne méritent rien d’autre que la dérision.”
    Quand on est honnête, on ne coupe pas le propos pour le détourner de son sens à moins de vouloir avoir à tout prix le dernier mot.
    Pour la violence, après avoir écrit de tels propos que les vôtres, vous êtes quand même sacrément culotté pour retourner l’accusation.
    Je redis donc que vous n’oseriez jamais me dire cela face à face. Parce que profiter de l’anonymat lointain pour injurier des gens, c’est une attitude lâche. Et par définition, ceux-ci agissent loin des risques.
    Avec moi, le seul risque serait que je vous blesse dans votre amour-propre par mon ironie. Je suis assez doué et vous m’en donnez largement matière.
    Et ne venez pas jouer la victime et le héros maltraité. Pour en être digne, il faudrait commencer par vous comporter autrement. Comme un homme digne de ce nom qui respecte les autres et assume ses propos.
    Mais vu que vous perdez pied et que vos nerfs vous lâchent pour une controverse, je n’ose pas imaginer les conséquences d’un face à face.
    Il faut mieux en rester au statut de guerrier, croisé?, du Web!

  • Jean-Pierre , 1 novembre 2011 @ 13 h 40 min

    “Vous n’oseriez jamais me dire cela face à face”… ça se voit que vous ne me connaissez pas ! Et si, ce sont des menaces à peine voilées que vous avez proférées. Je n’ai pas coupé votre propos, j’ai cité la phrase entière. Assumez ce que vous écrivez. Quelqu’un qui en vient à cette sorte d’insinuations est pour moi un type qui perd son calme et qui n’a pas d’argument. Sur le fond vous n’avez toujours pas répondu : vous préférez esquiver en essayant de me “moucher” comme vous écrivez plus haut. Continuez à faire mumuse si c’est ça votre passe-temps mais vous comprendrez maintenant que j’ai d’autre chat à fouetter que de gaspiller mon énergie à tenter vainement de raisonner un interlocuteur immature, borné et irrespectueux.
    Sans rancune et bon courage dans la vie ! Au revoir.

  • mcr , 1 novembre 2011 @ 14 h 15 min

    heureusement qu’il y a des journalistes comme vous … ne vous laissez pas abattre par ceux qui vous insultent. ils n’auront que ce qu’ils méritent … parpaillottement vôtre …

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